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ne douta pas que s’il pouvoit ſe reſoudre à luy teſmoigner quelque affection, elle ne ſe reſolust à la recevoir favorablement ; joint qu’elle ne croyoit point du tout que Perinthe fuſt amoureux, comme Doraliſe l’aſſuroit en raillant : de ſorte que juſtement au ſortir de chez Doraliſe, d’où ſi venoit de luy parler d’Andramite, il reçeut ordre d’aller parler à la Princeſſe. Il ne fut pas plus toſt aupres d’elle, qu’elle luy dit qu’elle vouloit luy donner une marque de ſon amitié : l’en ay deſja tant reçeu, luy dit il, Madame, que je ne dois pas eſtre ſurpris de vous voir agir avec tant de bonté : mais je dois ſans doute aprehender de mourir ingrat. Vous vous aquiterez bien toſt de tout ce que vous croyez me devoir, repliqua t’elle, ſi vous le voulez : dittes moy donc s’il vous plaiſt, Madame, luy dit il avec precipitation, ce qu’il faut que je face pour cela. Il faut, luy dit elle, que vous vous attachiez un peu plus aupres de Doraliſe que vous ne faites : ce n’eſt pas que je ne voye que vous eſtes ſouvent avec elle : mais Perinthe, ſi vous voulez m’obliger, vous y ſerez comme avec une perſonne que je vous prie d’eſpouser, afin que je ne la perde point : & que vous attachant tous deux à mon ſervice, nous ſoyons toute noſtre vie inſeparables. je sçay (adjouſta t’elle, ſans luy donner loiſir de parler) que quoy que Doraliſe en die, elle ne vous croit point amoureux non plus que moy : c’eſt pourquoy sçachant combien vous l’eſtimez, & quel eſt le merite & le bien de cette Perſonne je ne penſe pas vous faire une propoſition injuſte, ny que vous me douiez refuſer. Panthée ayant ceſſé de parler, & Perinthe eſtant revenu de l’eſtonnement où le diſcours de la Princeſſe l’avoit mis, luy reſpondit à la fin avec autant de fineſſe que de civilité, quoy que ce fuſt avec une