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Abradate ; & il ne sçauroit jamais eſtre loüé par une perſonne qui le sçache mieux faire que vous. Mais comme voſtre modeſtie (luy dit il d’une maniere tres adroite, afin de l’obliger à parler dignement de luy) vous empeſcheroit ſans doute de dire vos propres actions à la Princeſſe, & que je n’oſerois luy eſcrire de mon chef, n’en ayant pas eu la permiſſion comme vous ; ſouffrez que j’adjouſte quelque choſe à voſtre Lettre. Et alors ſans attendre la reſponce de Perinthe, qui s’y oppoſa autant qu’il le pût ſans choquer la civilité ; il y eſcrivit ce que je m’en vay vous dire.

L’agreable relation de Perinthe ſeroit trop imparfaite, ſi vous n’y trouviez pas une partie des louanges qu’il mente, pour s’eſtre ſignalé comme il a fait, en toutes les occaſions qui ſe ſont preſentées : c’eſt pourquoy je vous conjure pour voſtre ſatisfaction pour ſa gloire, & pour la mienne, de ſouffrir que je ſois ſon Hiſtorien : & que je vous die qu’à la reſerve de l’illuſtre Cleandre, il merite toute la gloire qu’il donne aux autres. Voila Madame, ce qu’a creû vous devoir dire un homme qui n’en pretend point d’autre, que celle d’eſtre creû le plus reſpectueux des Adorateurs de la plus belle Princeſſe de la Terre.

Apres qu’Abradate eut eſcrit ce que je viens de dire, & que Cleandre l’eut leû tout haut, Perinthe ſe trouva le cœur bien partage : car eſtre loüé ſi hautement par un Prince comme celuy là, eſtoit une choſe qu’il croyoit luy devoir eſtre avantageuſe aupres de la Princeſſe : mais auſſi envoyer luy meſme une Lettre d’un auſſi redoutable Rival à la Perſonne