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Air du Piège


Dans mon cœur, de désirs épris,
Je sens encore la jeunesse ;
Mais, sur mon front, j’ai là des cheveux gris
Qui représentent la sagesse.
Aussi chacun se dit. c’est un Caton !
La multitude, aisément égarée,
Croit qu’on s’attache au char de la raison,
Dès qu’on en porte la livrée.

FRÉDÉRIC.

À la bonne heure ; mais te placer parmi les pauvres !

SAINT-EUGÈNE, frappant son gousset.

Il me semble que j’y ai des droits ; c’est un emploi modeste, peu d’appointemens, mais beaucoup de bien à faire ; j’ai des projets superbes, je veux que tous les pauvres deviennent riches.

FRÉDÉRIC.

Ils ne demanderont pas mieux.

SAINT-EUGÈNE.

J’ai eu un de mes prédécesseurs qui y est devenu millionnaire, et il n’est sorti de l’administration que parce qu’il finissait par y être déplacé. Du reste, je vais habiter Nantes ; j’y serai sous les yeux et la surveillance de M. Canivet, administrateur en chef.

FRÉDÉRIC.

Qu’est-ce que tu me dis là ? M. Canivet ! quel bonheur ! moi qui épouse sa fille ! nous allons nous trouver réunis.