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POLIGNI.

Vous trouvez ; c’est bien peu cependant.

MADAME DE BRIENNE.

Et que vous faut-il de plus ? que nous manquera-t-il ? À Paris, nous serions peut-être un peu ignorés, et vous avez de l’ambition, vous tenez à paraître ; mais en province nous serons riches, nous serons considérés, nous serons même les premiers de l’endroit : cela dépendra de celui que nous choisirons.

POLIGNI.

Quoi ! vous voudriez….

MADAME DE BRIENNE.

Oui, monsieur ; quoi qu’en ait dit un auteur fort spirituel, il existe encore dans les petites villes des sociétés très-aimables, des gens instruits, des gens de mérite ; il y a de l’esprit en province : maintenant il y en a partout, et là comme ailleurs on trouve le bonheur quand on le porte avec soi. Il nous y suivra ; car l’unique soin de ma vie sera d’embellir la vôtre, d’éloigner de vous les chagrins. J’ai été bonne avec un vieux mari que je n’aimais pas, jugez donc avec vous ! combien votre bonheur me sera facile ! je n’y aurai pas de mérite. Ainsi, monsieur, un intérieur agréable, de bons amis, une bonne femme qui vous aime, voilà ce qu’on n’a pas souvent avec cent mille francs de rentes, et voilà ce que vous aurez ! Etes-vous pauvre maintenant ?

POLIGNI.

Non, je suis le plus riche, et le plus heureux des hommes. Vous l’emportez, vous triomphez de toutes