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pensais. N’était-ce pas bien mal ? n’était-ce pas horrible ? Voilà, monsieur, voilà des torts véritables, et ceux-là cependant vous ne me les reprochez pas !

POLIGNI.

Ah ! je n’en ai plus la force, je n’en ai plus le courage ! C’est à moi maintenant à me justifier à vos yeux. Oui, je vous aime, et plus que jamais.

MADAME DE BRIENNE.

À la bonne heure au moins ! Pas un mot de plus… celui-là suffit ; tout est pardonné….

POLIGNI.

Ah ! tant de vertus, tant d’amour, méritaient un meilleur sort, et si vous saviez celui que je peux vous offrir ! Il est si peu digne de vous ! Voilà la cause de mes tourmens, voilà ce qui me rend le plus malheureux des hommes.

MADAME DE BRIENNE, souriant.

Il serait possible ! Un autre défaut encore : vous avez de l’ambition.

POLIGNI.

Oui, j’avais celle de vous rendre heureuse ; il est si doux d’enrichir ce qu’on aime ! Mais vous voir éclipsée par des femmes orgueilleuses, qui sont si loin de vous, et qui ne vous valent pas ! c’est la ce qui me froisse et m’humilie. Mon bonheur eût été de prévenir tous vos vœux, de voler au-devant de vos moindres désirs ; au lieu de cela, lorsque je verrai vos yeux attachés sur quelques brillantes parures, je serai donc obligé de vous dire : ne les regardez pas ; je ne puis vous les donner.