je l’étais. Il partit, en me jurant un amour éternel, et depuis je ne l’ai point revu.
Jamais ? Vous deviez cependant de temps en temps vous rencontrer de loin dans le monde ?
Cela revenait au même : je n’osais pas le regarder. Quelquefois seulement nous recevions Olivier, un artiste, un jeune peintre qui devait à mon mari son éducation, ses talens ; et monsieur de Brienne avait eu bien raison de le protéger. Olivier était si bon, si aimable ! Il me parlait toujours de Poligni, son camarade de collège ; je ne répondais pas, mais j’écoutais. Ce pauvre Olivier, depuis ce temps-là je l’ai pris en amitié. Occupée de mes devoirs, résignée à mon sort, je tâchais d’être heureuse, du moins quand mon père me regardait, et il est mort en me bénissant. Mais quand je l’eus perdu, quand il fallut quitter la France, tous mes amis, tous mes souvenirs ; ah ! que je fus malheureuse ! que j’ai souffert pendant ces trois années ! me reprochant jusqu’aux tourmens que j’éprouvais, je cherchais à les expier en redoublant de soins, de tendresse pour un vieil époux, que j’aurais voulu aimer autant qu’il m’adorait. Mais ce n’était pas ma faute ; ce n’était pas possible ; mon cœur était resté ici, près de vous. En quittant ma patrie, j’y avais laissé le bonheur, et en la revoyant j’ai tout retrouvé.
Chère Amélie ! il n’a pas dépendu de moi que nous