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piquillo alliaga.

fiancée ne paraît pas folle-de lui. C’est une drôle de noce que celle-là !

Mais, soutenu par le pilier, puis par la chaise qui le reçurent au moment où il tombait.

— En vérité ? dit Piquillo, qui s’intéressait malgré lui au récit de la jeune jardinière. Et quand se célèbre ce mariage ?

— Dans ce moment même. N’entendez-vous pas les cloches ? La chapelle du château, dont vous voyez d’ici portail, est si petite, que tout le monde n’y peut tenir ; voilà pourquoi la moitié du village reste ici sur la pelouse. Imaginez-vous, seigneur pèlerin, continua la jeune fille, enchantée de pouvoir causer, imaginez-vous que les mariés sont arrivés hier soir. La noce ne devait se faire que demain, mais il est survenu un ordre de la cour pour que le mariage eût lieu aujourd’hui même.

— C’est étonnant ! dit Piquillo. Mais en êtes-vous bien sûre ?

— Je tiens tous ces détails d’une jeune fille qui est arrivée ici avec la mariée, et qui l’a habillée ce matin, Juanita.

— Juanita ! s’écria Piquillo avec émotion, tout en se disant en lui-même que toutes les femmes de chambre s’appelaient Juanita.

— Tenez, tenez, continua la jardinière, le bruit des cloches redouble, et j’entends les orgues ; c’est sans doute le moment de la bénédiction ; venez, seigneur pèlerin, approchons-nous, nous verrons peut-être de loin.

Piquillo la suivit par un mouvement machinal, et se tint quelque temps devant la porte de l’église.

Mais il ne distinguait rien, il y avait trop de monde devant lui. Tout à coup un flot de curieux venant du dehors et faisant irruption en avant, porta Piquillo d’une seule secousse presque au milieu de la chapelle, et sans un pilier qui servit de digue aux vagues mouvantes de la foule, il aurait été jusque sur les marches de l’autel.

Appuyé contre le pilier qui le soutenait, et cherchant à s’élever sur le bâton d’une chaise, Piquillo dominait en quelque sorte tous ceux qui l’entouraient. La cérémonie venait de finir. Le marié avait donné le