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piquillo alliaga.

de sa longue-vue, le général n’aperçut que l’arrière-garde, ou plutôt les traînards de l’armée assiégeante, qui avaient fait volte-face et paraissaient se diriger vers la porte Charles-Quint, celle par laquelle devait entrer le roi. Le comte de Lémos s’épuisait en conjectures, et d’Aguilar cherchait vainement quel hasard imprévu, quelle manœuvre stratégique ou quelle panique soudaine venait de lui dérober la victoire et de lui enlever ses combattants avant le combat.

Ah ! tu étais là, tant mieux ! que cela te serve de leçon.

Tout à coup on vit arriver du bout de la promenade un cavalier s’avançant au galop. D’une main il agitait un drapeau blanc, de l’autre il tenait une large lettre avec le sceau de l’État. Il s’arrêta devant l’hôtel d’Aguilar, et cria :

— Ouvrez, au nom du roi !

— À ce nom révéré, don Juan s’inclinant avec respect, fit signe d’ouvrir l’hôtel ou plutôt la forteresse qu’il avait juré de défendre, et le cavalier s’élança dans la place. C’était un brigadier du régiment de l’Infante, Fidalgo d’Estremos,

— On m’a assuré, dit-il, que monseigneur le gouverneur de Pampelune était dans cet hôtel.

— C’est moi, monsieur, dit le comte de Lémos en s’avançant.

— Une lettre du roi, monseigneur.

Il la lui remit. Le comte se hâta de la décacheter, et pendant ce temps don Juan interrogeait le brigadier.

— Où est le régiment dont tu fais partie ?

— Aux portes de la ville, avec le régiment des gardes wallonnes.

— À merveille.

— Vous accompagnez le roi ?

— Oui, monseigneur, et M. le comte de Lerma !

— Et vous n’êtes pas disposés, je l’espère, à reculer devant des bourgeois ?

Pour toute réponse, le brigadier porta la main à la poignée de son sabre.

— Bien ! s’écria d’Aguilar, avec des braves gens tels que vous, il n’y a ni ville ni remparts qui puissent tenir ! Eh bien ! dit-il au comte de Lémos, qui venait