Page:Scribe - Le Verre d'Eau ou les Effets et les Causes, 1860.djvu/41

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA REINE, à part, avec impatience. Encore une scène de plaintes et de jalousie… en voilà pour toute la journée. (Haut.) Eh ! non, duchesse… tout cela n’existe que dans votre imagination, qui dénature et exagère tout. Cette correspondance n’a rien de politique, et ce qu’elle renferme est d’une nature telle…

LA DUCH. Que Votre Majesté craint de me la montrer…

LA REINE, avec impatience. Par égard pour vous. (La lui donnant.) Car elle contient des faits que vous ne pouvez nier.

LA DUCH., parcourant la lettre. N’est-ce que cela ? L’attaque est peu redoutable.

LA REINE. Ne vous êtes-vous pas opposée à l’admission d’Abigaïl ?

LA DUCH. Et c’est que je ferai encore de tout mon crédit auprès de Votre Majesté.

LA REINE. Il n’est donc pas vrai, comme on l’assure, qu’elle est votre cousine ?…

LA DUCH. Si madame… j’en conviens, je l’avoue hautement ; c’est pour cela même que je n’ai point voulu la lacer auprès de vous. On m’accuse depuis si longtemps, moi surintendante de votre maison, de donner tous les emplois à mes amis, à mes parents, à mes créatures ; de n’entourer Votre Majesté que de ma famille ou de gens à ma dévotion ; nommer Abigaïl serait donner contre moi un prétexte de plus à la calomnie ; et Votre Majesté est trop juste et trop généreuse pour ne pas me comprendre.

LA REINE, avec embarras et à moitié convaincue. Oui certainement… je comprends