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LE MARQUIS.

Quand je la vois malheureuse !

MARGUERITE.

C’est son bonheur ! laissez-lui le sien et gardez le vôtre. Hier soir, par exemple, et pendant que ce pauvre Desgrieux se rendait à la caserne… pourquoi chercher à voir Manon ?

LE MARQUIS.

Pour la rassurer !… pour la consoler !

MARGUERITE.

N’étais-je pas là ?

LE MARQUIS.

C’est peut-être toi, alors, qui l’as empêchée de me recevoir ?

MARGUERITE.

Précisément ! est-ce que cela était convenable ?… se présenter à une pareille heure ! vous, jeune, aimable et séduisant… car vous l’êtes beaucoup, monseigneur, vous le savez bien ! et tout ce déploiement de forces, contre une grisette, une jeune fille sans appui ! ce n’est pas brave !… ce n’est pas bien !

LE MARQUIS, avec hauteur.

Marguerite !

MARGUERITE.

Il vous faut des ennemis plus dignes de vous ! de grandes coquettes habituées à l’attaque et à la défense ! mais mademoiselle Manon ?… qu’est-ce que c’est ?… un caprice !… pas autre chose !

LE MARQUIS.

C’est possible ! mais rien ne ressemble à une passion comme un caprice… contrarié.

MARGUERITE.

Allons donc !