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ufra, la chienne la plus agile du nord, vit partir le cerf, et s’élança comme l’éclair : elle laissa derrière elle les lévriers du roi, et, se précipitant sur sa proie, enfonça dans ses flancs ses dents aiguës, et se désaltéra dans son sang. Voyant la chasse interrompue par un étranger, le piqueur du prince accourt furieux, et frappe de sa courroie le noble limier.

Douglas avait souffert en silence l’indifférence du roi, le dédain des nobles, et, ce qui est plus cruel encore pour une ame fière, la pitié de la populace. Mais Lufra avait été élevée avec un tendre soin ; elle partageait ses repas, et veillait pendant son sommeil. Souvent Hélène, dans ses jeux enfantins, aimait à orner de guirlandes de fleurs le cou de Lufra. Le nom seul de Lufra rappelait à Douglas le souvenir d’Hélène. Sa rage long-temps étouffée éclate enfin sur son front et dans ses yeux étincelans. La foule lui ouvre un libre passage, comme on voit les vagues se séparer sous la proue d’un navire : d’un seul revers de main le piqueur tombe baigné dans son sang.

Un coup aussi terrible n’aurait pu être porté par tout autre bras que celui de Douglas, eût-il été armé d’un gantelet de fer.

XXVI.

Les hommes de la suite du roi font entendre leurs cris et leurs menaces ; ils brandissent leurs fers et leurs lances ; mais le baron leur adresse ces paroles sévères :

— Vils esclaves, retirez-vous, ou redoutez la mort et Douglas ! Oui, prince, c’est Douglas lui-même, condamné par toi et cherché partout, qui vient, victime volontaire, s’offrir pour apaiser la guerre, et qui ne demande grace que pour ses amis.

CHANT C1NQUIEME. 429

C’est donc là le prix de ma clémence, baron présomptueux, reprit le monarque. De tout ton clan égaré par l’ambition, tu es le seul, toi, Jacques de Bothwell, en qui ma coupable faiblesse refusa de voir un ennemi : mais ton roi souffrira-t-il tes outrages et tes regards dédaigneux ! Holà, capitaine de ma garde, donnez à Douglas une escorte convenable.... Qu’on termine les jeux.. (Car le tumulte allait croissant, et les métayers commençaient à tendre leurs ares)… Qu’on termine les jeux, répéta Jacques en fronçant le sourcil ; que nos cavaliers dispersent la foule !

XXVII.

Le désordre et les cris d’une émeute troublèrent la fin de ce jour de fête. Les gardes à cheval fondirent au mi-lieu de la foule et furent repoussés avec insulte et menaces : les vieillards et les i