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us déjà quitté cette grotte sinistre ! Le malheur habite toujours les lieux qu’ont fréquentés les fées malfaisantes… Je me rappelle une

histoire miraculeuse qui en est la preuve... Chère Hélène, bannis cet air de tristesse ! Ma harpe avait autrefois la vertu de charmer tes chagrins.

— Alian, tu le veux ; je t’écoute : mais puis-je arrêter mes larmes involontaires ?

Le ménestrel préluda sur sa harpe, et commença sa ballade ; mais le cœur d’Hélène était distrait par d’autres pensées.

LA BALLADE, ALICE-BRAND

Quoi de plus doux que, d’errer dans ta verte loxéi

396 LA DAME DU LAC.

quand la grive et le merle font entendre leur ramage, quand l’agile chevreuil fuit comme un trait pour échapper aux limiers ; quand le cor des chasseurs retentit au loin sous le feuillage ?

— O Alix ! j’ai abandonné pour toi ma terre natale ; nous sommes forcés d’habiter les coteaux et les bois, comme font les proscrits !

O Alix ! si dans la nuit fatale de notre fuite j’ai tué ton vaillant frère, ce fut pour l’amour de ta :brillante chevelure et de tes yeux bleus.

Il faut maintenant que cette main, habituée à saisir le glaive, abatte le hêtre des bois, compose notre humble couche de son feuillage, et forme de ses branches une barrière pour la grotte qui nous sert d’asile !

Il faut que ta douce main, qui ne touchait que les cordes de la harpe, dépouille la bête fauve pour faire un manteau qui nous défende du froid ?

— O Richard ! si mon frère a péri, je ne puis en accuser qu’une destinée fatale. Le combat eut lieu pendant les ténèbres ; le hasard seul dirigea contre son sein le fer de ta lance.

Sijene puis plus me parer d’une riche robe, ni toi d’un manteau d’écarlate, nous préférerons la couleur fauve et le vert des forêts, dont le doux éclat flatte davantage la vue.

Cher Richard ! si notre sort est cruel, si tu as perdu ta terre natale, ah ! du moins Alix conserve son Richard, et Richard son Alix !