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furent indignement pendus aux portes de leurs châteaux[1]. Leur sang crie vengeance dans les prairies de Meggat, parmi les fougères de l’Yarrow, sur les rives de la Tweed, dans les lieux qu’arrose l’onde solitaire de l’Ettrick, et sur les bords du Teviot ; tous ces vallons, où des clans guerriers guidaient leurs chevaux, ne sont plus que d’arides déserts. Le tyran de l’Ecosse, si connu par ses perfidies et ses vengeances, vient dans ces lieux : c’est le même dessein qui l’amène ; il a choisi de nouveau le prétexte de la chasse : que le sort des guerriers de la frontière nous fasse juger de la grâce que peuvent espérer de lui les Chefs des montagnes[2] ! Bien plus, on t’a reconnu, ô Douglas ! dans la forêt de Glenfinlas : j’en suis informé par un espion sûr, et je te demande ton avis dans cette situation critique. —

XXIX.

Hélène et lady Marguerite, saisies d’effroi, cherchèrent à se rassurer mutuellement dans les regards l’une de l’autre, et puis elles tournèrent leurs yeux effarés, Hélène vers son père, lady Marguerite vers son fils. Le visage de Græme changea plusieurs fois de couleur ; mais on voyait bien que ce n’était que pour Hélène qu’il concevait des craintes. Triste, mais sans paraître abattu, Douglas donna son avis en ces termes :

— Brave Roderic ! l’orage gronde, mais il peut passer après une vaine menace. Cependant je ne puis me résoudre à demeurer ici une heure de plus pour attirer la foudre sur ta demeure ; car tu n’ignores pas que c’est surtout ma tête blanchie par l’âge que cherche la colère du roi. Pour toi, qui peux mettre à la disposition de ton souverain une troupe de vaillans guerriers, ton hommage et ta soumission doivent détourner les ressentimens du monarque.

Malheureux débris de la maison de Douglas, Hélène et moi nous irons chercher un refuge dans quelque grotte sauvage, et là, comme le cerf échappé à la meute, nous attendrons que les chasseurs aient cessé de battre les montagnes et les clairières.

XXX.

— Non, non, je le jure sur l’honneur, s’écria Roderic, il n’en

  1. « En 1529, Jacques V, à la suite d’une décision de son conseil, prit des mesures énergiques pour comprimer les clans des frontières, dont les déprédations s’étaient souvent renouvelées pendant sa minorité. Il rassembla une espèce de camp volant, où se rendit toute sa noblesse, qui avait ordre d’amener ses faucons et ses meutes, afin que le roi pût jouir du plaisir de la chasse dans les intervalles de l’expédition. Il parcourait ainsi la forêt d’Ettrick, faisant pendre à droite et à gauche les Chefs rebelles, etc. » (Histoire d’Ecosse, par Pitscottie.)
  2. Il est vrai que Jacques s’appliquait également à réprimer le brigandage et l’oppression féodale dans toutes les parties de son royaume. On peut consulter à ce sujet Pitscottie, p. 153.