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animal est tombé pour ne plus se relever ! Ému par la pitié et ses regrets, le chasseur se lamente ainsi sur son coursier expirant :

— Je ne pensais guère, quand pour la première fois je guidais ta fougue naissante sur les rives de la Seine ; je ne pensais guère, ô mon incomparable coursier ! que tes membres agiles serviraient de pâture à l’aigle des montagnes d’Ecosse ! Maudite soit la chasse ! maudit soit le jour qui me prive de toi, ô mon coursier chéri !

X.

Il sonne du cor pour rappeler ses chiens d’une vaine poursuite : les chiens reviennent d’un pas ralenti et inégal ; ils se pressent à ses pieds, traînant la queue et baissant l’oreille. Pendant que les derniers sons du cor se prolongent dans la ravine, le hibou tressaille et se réveille ; l’aigle répond par ses cris ; les échos se renvoient tous ces sons, qui ressemblent bientôt à la voix lointaine d’un ouragan.

Le chasseur se retire pour rejoindre ses compagnons ; mais il tourne souvent la tête, tant les sentiers qu’il parcourt lui paraissent étranges ! tant l’aspect bizarre de ces lieux excite sa surprise !

XI.

Le soleil couchant déroulait ses vagues de pourpre au-dessus de cet obscur vallon, et inondait de sa lumière chaque pic de la montagne ; mais aucun rayon ne pouvait percer la profondeur ténébreuse des ravines. Un double sentier serpentait autour de mainte roche pyramidale, dont le sommet sillonné par la foudre s’élançait jusqu’aux nues, et de mainte masse isolée, remparts naturels de ces passages, semblables à cette tour ambitieuse élevée par l’orgueil dans la plaine de Shinar. Les rochers étaient taillés les uns en forme de tourelles, de dômes ou de créneaux ; les autres, créations plus fantastiques encore, rappelaient les coupoles ou les minarets, les pagodes et les mosquées de l’architecture orientale. Ces édifices, construits par la nature, avaient aussi leurs ornemens et leurs nobles bannières : on voyait leurs âpres sommets déployer, sur les précipices, les vertes guirlandes de l’aubépine étincelant de rosée, et la douce haleine du soir faisait flotter le feuillage varié de mille arbustes grimpans.

XII.

La nature a prodigué à ces lieux toutes les plantes des montagnes : ici l’églantier embaume l’air ; là s’entremêlent le coudrier et l’aubépine ; la pâle primevère et la violette azurée trouvent un