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LE NAIN NOIR

plus, j’espère, aux temps où la vengeance d’une querelle faisait partie de l’héritage qu’un père laissait à ses enfants.

— Vous traitez la chose trop légèrement, Lucy.

— Pas du tout. Quoique votre père fût présent à cette malheureuse affaire, on n’a jamais cru qu’il ait porté le coup fatal. Dans tous les cas, même aux époques des guerres de clans, la main d’une fille, d’une sœur, n’a-t-elle pas été souvent un gage de réconciliation ? — Vous riez de mon érudition en matière de romans ; mais je vous assure que si votre histoire était écrite, le lecteur vous déclarerait d’avance la dame des pensées d’Earnscliff et sa future épouse, à cause même de l’obstacle que vous supposez insurmontable.

— Nous ne sommes plus au temps des romans, mais à celui de la triste réalité ; car voilà le château d’Ellieslaw.

— Et j’aperçois à la porte sir Frédéric Langley, j’aimerais mieux toucher un crapaud. Le vieux Horsington, le valet d’écurie, me servira d’écuyer.

En parlant ainsi, miss Ilderton fit sentir la houssine à son coursier, passa devant sir Frédéric, qui s’apprêtait à lui offrir la main, sans daigner jeter un regard sur lui, et sauta légèrement à terre dans les bras du palefrenier. Isabelle aurait bien voulu l’imiter, mais elle voyait son père froncer le sourcil et la regarder d’un air sévère ; elle fut contrainte de recevoir les soins d’un amant odieux.