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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

d’une voix presque inarticulée ; je sais à peine ce que je veux vous dire, et je ne trouve pas de termes pour m’exprimer.

— S’il m’est possible de soulager vos inquiétudes, chère Edith, croyez que rien ne me coûtera pour y réussir.

— Vous êtes donc bien déterminé, Milord, à aller joindre des hommes qui courent à leur perte, malgré votre propre raison, malgré les prières de vos amis ?

— Excusez-moi, miss Bellenden, mais l’intérêt même que vous voulez bien me témoigner ne peut me retenir quand l’honneur m’ordonne de partir. Ma suite est préparée chez moi, le signal de l’insurrection sera donné dès que je serai arrivé à Kilsythe. La fidélité que je dois à mon roi ne me permet ni d’hésiter, ni de différer plus longtemps. Si c’est ma destinée qui m’appelle, je ne chercherai pas à la fuir.

— Restez, Milord, s’écria Edith d’un ton qui pénétra Evandale jusqu’au cœur ; restez pour être notre secours et notre soutien. Espérez tout du temps. Il expliquera sans doute l’étrange événement qui m’a troublée hier, et me rendra la tranquillité.

— Il est trop tard, Edith, et je manquerais de générosité si je cherchais à profiter des sentiments que vous me montrez en ce moment. Il ne dépend pas de vous de m’aimer, et je ne prétends plus qu’à votre amitié. Mais, quand même il en serait autrement, le sort en est jeté : je ne puis plus…

Tout à coup Cuddy se précipite dans le salon, la terreur peinte sur la figure, en s’écriant : — Cachez-vous, Milord, cachez-vous ! ils vont entourer la maison.

— De qui parlez-vous ? demanda lord Evandale.

— D’une troupe de cavaliers conduite par Basile Olifant.

— Oh ! Milord, pour l’amour de moi, cachez-vous ! répéta Edith.

— Me cacher ! Non, de par le ciel ! Eût-il un régiment avec lui, je m’ouvrirais un passage. — Cuddy, dites à Holliday et à Hunter de monter à cheval. — Adieu, chère Edith !

Il la serra dans ses bras, et ayant fait à la hâte ses adieux à sa sœur et à lady Marguerite, il sauta en selle et partit. La confusion et la terreur régnaient dans la maison, d’où l’on voyait une petite troupe de cavaliers, descendre la colline ; ils avançaient lentement et avec précaution, comme des gens qui ignorent quelles forces on peut avoir à leur opposer.

— Il peut se sauver ! s’écria Edith. — Et ouvrant une fenêtre : — Milord, cria-t-elle, prenez sur la gauche et fuyez à travers champs.

Mais jamais lord Evandale n’avait fui devant le danger. Il or-