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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

recevoir d’une onde. Le sentier suivait la rive du ruisseau, qui tantôt était visible, et tantôt ne se distinguait plus que par son murmure sur les cailloux.

Il entrait dans un endroit où la vallée commençait à s’élargir. Un champ cultivé et une petite prairie annonçaient la main et la présence de l’homme ; un peu plus loin, sur le bord de la route, s’élevait une petite chaumière. Une inscription mal écrite, et plus mal orthographiée, annonçait au voyageur qu’il y trouverait bon logis, à pied comme à cheval. Cette invitation n’était pas à dédaigner, eu égard à l’aridité du pays qu’on venait de parcourir pour y arriver, et à la région plus sauvage encore qui s’étendait au delà de ce modeste asile. — Ce n’est que dans un endroit semblable que Burley pouvait trouver une confidente digne de lui, pensa Morton.

En s’approchant il aperçut la maîtresse de la maison, assise à la porte et occupée à filer. — Bonsoir, la mère, lui dit-il ; ne vous nommez-vous pas mistress Maclure ?

— Elisabeth Maclure, Monsieur ; pour vous servir.

— Pouvez-vous me loger cette nuit ?

— Oui, Monsieur, si vous voulez bien vous contenter du peu que je pourrai vous offrir.

— J’ai été soldat, ma bonne femme.

— Soldat, que le ciel vous accorde un autre métier !

— N’est-ce donc pas une profession honorable ?

— Je ne juge personne. Monsieur, et le son de votre voix me prévient en votre faveur. Mais j’ai vu faire tant de mal à ce pauvre pays par les soldats, que je me console d’avoir perdu la vue, en songeant que je n’en pourrai plus voir.

Comme elle parlait ainsi, Morton remarqua qu’elle était aveugle.

— Mais ne vous incommoderai-je pas, ma bonne femme ? lui dit-il d’un ton de compassion ; l’état où vous êtes ne paraît pas vous permettre de vous livrer aux travaux de votre profession.

— Ne craignez rien, Monsieur, je connais la maison, et j’y marche comme si j’avais encore mes yeux. D’ailleurs, j’ai une jeune fille pour m’aider, et quand les dragons reviendront de leur patrouille, pour une bagatelle ils auront soin de votre cheval.

D’après cette assurance, Morton mit pied à terre.

— Peggy, dit l’hôtesse, menez le cheval de monsieur à l’écurie, et jetez dans le râtelier une botte de foin en attendant que les dragons arrivent… Entrez, Monsieur, dit-elle ensuite à Morton : la maison n’est pas belle, mais au moins elle est propre.