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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

— Vous savez le nom de notre chien ! s’écria Alison toute surprise. Il n’est pourtant pas commun. Mais je vois qu’il vous connaît aussi ! — Bonté divine ! reprit-elle d’une voix de plus en plus émue, c’est mon pauvre enfant ! c’est M. Henry !

À ces mots, la bonne vieille étendit les bras vers Morton, le serra sur son cœur, l’embrassa avec la même tendresse que si elle eût été sa mère, et finit par pleurer de joie. Sensible à ces marques d’attachement, Henry, à son tour, lui prodigua des preuves d’affection. Il n’avait plus le courage de dissimuler avec elle.

— Oui, ma chère Alison, c’est bien moi. Je vis encore pour vous remercier de votre attachement si fidèle, et pour me réjouir de retrouver au moins une amie qui me reçoit avec plaisir.

— Oh ! des amis, monsieur Henry vous n’en manquerez pas : on a toujours des amis quand on a de l’argent, et, Dieu merci ! vous en aurez, et beaucoup ; tâchez d’en faire un bon usage. — Mais mon Dieu ! ajouta-t-elle en le repoussant un peu, comme pour le considérer d’une distance plus convenable à sa vue ; que vous êtes changé, mon enfant ! Vos couleurs sont passées, vos joues sont creuses, vos yeux sont enfoncés, vous avez maigri. — Ah ! ces maudites guerres, combien de mal n’ont-elles pas causé ! — Et depuis quand êtes-vous de retour ? — et où avez-vous été ? — et qu’avez-vous fait ? — et pourquoi ne nous avez-vous pas écrit ? — et comment se fait-il qu’on vous ait cru mort ? — et pourquoi êtes-vous venu dans votre maison comme un étranger.

Elle riait et pleurait en parlant ainsi, et il se passa quelque temps avant que Henry fût assez maître de sa propre émotion pour pouvoir répondre à ces questions multipliées.