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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

combattre, ni le bon esprit de faire la paix. Est-il temps de se quereller sur des points de discipline ecclésiastique, alors que l’édifice est menacé d’une destruction totale ? Souvenez-vous, mes frères, que le dernier et le plus fatal des maux que Dieu appela sur le peuple qu’il avait choisi, le dernier et le plus terrible des châtiments que l’aveuglement et la dureté de cœur de ce peuple lui attirèrent, furent des dissensions sanglantes qui divisèrent la cité au moment où l’ennemi tonnait à ses portes.

Plusieurs applaudirent à grands cris, d’autres répondirent par des huées. Mais déjà les colonnes de l’ennemi se dirigeaient vers le pont ; Morton les aperçut. Élevant de nouveau la voix : — Silence ! s’écria-t-il, voici l’ennemi : c’est de la défense du passage que dépendent notre vie et nos libertés : il y aura du moins un Écossais qui mourra pour les protéger. Que tous ceux qui aiment leur pays me suivent !

La foule vit se déployer l’infanterie royale dans un ordre imposant, flanquée d’une cavalerie redoutable, et des artilleurs établir une batterie pour foudroyer le camp. Un profond silence succéda tout à coup aux bruyantes clameurs. Chacun semblait frappé de stupeur.

Cependant lorsque Morton se dirigea vers le pont, il fut suivi d’une centaine de jeunes gens qui lui étaient particulièrement attachés.

— Éphraïm, dit Burley à Macbriar, la Providence a voulu se servir de la sagesse de ce jeune homme pour nous montrer le seul chemin de salut. Que celui qui aime la lumière suive Burley !

— Arrête ! s’écria Macbriar ; tu ne le suivras pas.

— Ne m’arrête point ! s’écria Burley ; il a dit la vérité, tout est perdu si l’ennemi emporte le pont. — À vos rangs ! — marchez avec vos chefs ! et maudit soit celui qui tournerait le dos !

Il prit le chemin du pont, accompagné d’environ deux cents de ses plus zélés partisans.

Après le départ de Morton et de Burley, un découragement total s’empara de l’armée. Les chefs en profitèrent pour rétablir un peu d’ordre : mais l’enthousiasme, l’énergie, tout avait disparu.

Kettledrummle, Poundtext, Macbriar se donnèrent beaucoup de mouvement pour faire entonner un psaume. Bientôt cette triste mélodie reçut un accompagnement plus lugubre encore par le bruit du canon et de la mousqueterie ; enfin, un nuage de fumée déroba les combattants à tous les yeux.