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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

les armes que pour la défense de la liberté civile et religieuse que les lois leur accordaient.

— C’est juger la question, et non la discuter. Chaque parti prétend avoir raison ; le tort reste donc à celui qui tire le premier l’épée.

— Hélas ! si nous voulions nous justifier par ce principe, combien il serait aisé de prouver que nous avons souffert avec une patience presque au-dessus des forces de l’homme. — Mais je m’aperçois qu’il est inutile de plaider devant miss Bellenden en faveur d’une cause qu’elle a condamnée d’avance, peut-être parce que les individus qui la défendent lui sont aussi odieux que les sentiments qu’ils professent.

— Je vous ai dit mon opinion sur leurs principes ; quant aux insurgés, je ne les connais pas… sauf peut-être une exception.

— Et peut-être cette exception a-t-elle influé sur votre manière de penser relativement à tous les autres ?

— Au contraire, il est… ou du moins j’ai cru autrefois qu’il était… doué de talents, de sensibilité. Puis-je approuver une rébellion qui a fait qu’un homme créé pour être l’ornement de sa patrie, se trouve aujourd’hui le compagnon d’ignorants fanatiques, le frère d’armes de bandits et de meurtriers ? Si jamais vous trouvez dans votre camp un homme qui ressemble à ce portrait, dites-lui qu’Edith Bellenden a versé plus de larmes sur le déshonneur dont il a couvert son nom, que sur les malheurs de sa propre famille.

En parlant ainsi, Edith jeta un regard sur son interlocuteur. La chaleur avec laquelle elle s’exprimait avait animé son teint ; mais la maigreur de son visage ne prouvait que trop la réalité des souffrances qu’elle avait endurées. L’étranger porta vivement une main à son front, et enfonça davantage son chapeau sur sa tête. Son agitation n’échappa pas à Edith.

— Et cependant, ajouta-t-elle, si… celui dont il s’agit se trouvait trop affecté de l’opinion, peut-être sévère, d’une ancienne amie, dites-lui qu’un repentir sincère peut tenir lieu de l’innocence : il a peut-être les moyens de réparer les maux qu’il a faits.

— Et de quelle manière ? reprit l’étranger.

— En employant tous ses efforts pour rétablir la paix dans ce malheureux pays ; en déterminant les rebelles trompés à mettre bas les armes et à implorer la clémence d’un souverain outragé, mais généreux.

— Miss Bellenden, répondit Morton en levant la tête et en écartant le manteau qui le couvrait, celui qui a perdu la place qu’il occupait dans votre estime, et qui en était si glorieux, est encore