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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

— Monsieur Balfour, s’écria Morton en portant la main à son épée, de tels propos exigent une satisfaction.

— Et tu l’auras quand tu voudras, jeune homme.

Ce fut au tour de Poundtext de s’interposer : il leur remontra les suites fâcheuses qu’une telle division pourrait entraîner, et parvint à opérer une espèce de réconciliation farouche.

— Eh bien, dit Burley, faites du prisonnier ce que vous voudrez, je m’en lave les mains. — Dingwal, dit-il en appelant un officier, dites à la garde chargée de veiller sur le prisonnier de céder son poste à ceux que le capitaine Morton choisira pour la relever.

En parlant ainsi il leur tourna le dos, sans leur dire adieu.

Ses deux collègues jugèrent que la prudence exigeait qu’ils assurassent la vie du prisonnier, en plaçant près de lui une garde sur la fidélité de laquelle ils pussent compter. Un certain nombre de paroissiens de Poundtext étaient restés avec Burley. Quatre d’entre eux acceptèrent les fonctions de sentinelles, et avec eux Morton laissa Headrigg, sur lequel il pouvait compter.

Ayant pris ces dispositions, Morton et Poundtext se logèrent comme ils purent pour la nuit dans ce misérable hameau ; mais ils ne songèrent à goûter quelque repos qu’après avoir rédigé un mémoire qui contenait les demandes des presbytériens modérés. La principale était d’obtenir la tolérance de leur religion, la permission d’avoir des ministres de leur croyance, et d’écouter leurs instructions dans leurs églises, enfin une amnistie générale en faveur de tous ceux qui avaient porté les armes pour cette cause. Ce n’était, à leur avis, que demander le libre exercice des droits naturels des Écossais, et ils se flattaient de trouver, même parmi les royalistes les plus zélés des avocats pour une concession qui ferait tomber les armes des mains d’une grande partie des insurgés.

Morton espérait d’autant plus que cette ouverture serait favorablement accueillie par le duc de Monmouth, que ce prince était d’un caractère doux, humain et conciliant. On savait qu’il n’apportait en Écosse aucun esprit de vengeance ; et il disait hautement qu’il aspirait à la gloire de pacifier le pays, plutôt qu’à celle de le subjuguer. Il semblait donc à Henry que la seule chose nécessaire pour intéresser le duc en leur faveur était de lui en faire porter la proposition par un homme considéré, et lord Evandale lui paraissait devoir parfaitement remplir cette mission pacifique. Il résolut de le voir le lendemain matin, et de s’assurer s’il consentirait à se charger du rôle de médiateur ; mais un événement fortuit vint hâter l’exécution de ce projet.