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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

Cette affaire terminée, il fallut déterminer la marche des opérations. Le cœur de Morton battit vivement quand il entendit proposer de s’emparer d’abord de Tillietudlem, comme d’une position des plus importantes. Poundtext insistait sur la nécessité de cette mesure, et les habitants des environs appuyaient son avis, parce que ce château pouvait offrir une retraite aux troupes royalistes.

— J’opine, dit Poundtext pour qu’on s’empare de la forteresse de cette femme nommée Margaret Bellenden.

— La place est forte, dit Burley ; mais quels sont ses moyens de défense ? Deux femmes peuvent-elles essayer de nous résister ?

— Il s’y trouve aussi, dit Poundtext, John Gudyil, sommelier de la vieille dame, il s’y trouve encore ce vieux royaliste, Miles Bellenden de Charnwood.

— Si ce Miles Bellenden, dit Burley, est le frère de sir Arthur, c’est un homme qui ne remettra pas l’épée au fourreau quand il l’en aura tirée ; mais il doit être fort âgé.

— Tout à l’heure le bruit courait dans le pays, dit un autre que, depuis la nouvelle de la déroute du régiment, on a fait entrer dans le château des vivres et des soldats, et qu’on a fermé la porte.

— Jamais ce ne sera de mon consentement, répondit Burley, que nous perdions notre temps à faire le siège d’un château. Il faut marcher en avant, et nous emparer de Glascow.

— Du moins, poursuivit Poundtext, nous pouvons déployer notre bannière devant Tillietudlem, et faire une sommation au château. Quoi que ce soit une race de rebelles, peut-être se rendront-ils. Nous donnerons un sauf-conduit pour Édimbourg à lady Marguerite Bellenden, à sa petite-fille, à Jenny Dennison ; mais nous mettrons aux fers John Gudyil, Hugues Harrison et Miles Bellenden.

— Qui parle de paix et de sauf-conduit ? s’écria une voix aigre et glapissante sortant du milieu de la foule.

— Silence, frère Habacuc ! dit Macbriar.

— Je ne me tairai pas, continua la même voix. Est-ce le temps de parler de paix, et de sauf-conduit, quand les entrailles de la terre sont ébranlées ; quand les rivières deviennent des fleuves de sang.

En parlant ainsi, le nouvel orateur parvint à s’avancer dans l’intérieur du cercle, et montra aux yeux étonnés de Morton une figure analogue à la voix et aux paroles qu’il venait d’entendre. Cet homme portait un habit en haillons. À coup sûr, ce vêtement était insuffisant pour le préserver du froid. Une longue barbe, blanche comme la neige, flottait sur sa poitrine. Son visage, amaigri, offrait à peine des traits humains. Son regard était farouche. Il tenait un sabre rouillé, teint de sang.

— Quel est cet homme ? dit tout bas à Poundtext Morton.