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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

lisé ; il s’apprêtait à répondre ; — Paix, Éphraïm ! lui dit Burley, souvenez-vous que c’est un enfant encore enveloppé dans ses langes.

— Écoute-moi, Morton, je vais te parler le langage de la raison charnelle, puisque c’est encore là ton guide aveugle et imparfait. Pour quel objet consentirais-tu à tirer l’épée ? N’est-ce pas pour obtenir la liberté des citoyens et de l’église ; pour que des lois sages empêchent un gouvernement arbitraire de confisquer les biens, d’emprisonner les individus, et de torturer les consciences selon son caprice ?

— Sans doute, répondit Morton, de tels motifs légitimeraient la guerre à mes yeux, et je combattrais pour les soutenir.

— Ce n’est pas cela, s’écria le prédicateur, il faut marcher droit au but. Ma conscience ne me permet pas de transiger, et de peindre sous de fausses couleurs les causes de la vengeance divine.

— Paix, Éphraïm Macbriar ! répéta Burley.

— Je ne me tairai pas, dit le ministre ; ne s’agit-il pas de la cause du Maître qui m’a envoyé ? N’est-ce pas une profanation de son autorité, une usurpation de sa puissance, une abjuration de son nom, que de mettre à sa place un roi ou un parlement, comme maître et gouverneur de sa maison, comme époux adultère de son épouse ?

— C’est bien parler, dit Burley en le tirant à part, mais c’est parler sans prudence. N’avez-vous pas entendu cette nuit, dans le conseil, que déjà la division règne parmi les restes dispersés des justes ? Voudriez-vous encore mettre un voile de séparation entre eux ?

— Je sais, répliqua Macbriar, que tu es fidèle, honnête, et zélé Jusqu’à la mort ; mais ces ruses mondaines, ces ménagements avec le péché et la faiblesse, sont des moyens coupables, et je crains que le ciel ne nous prive de l’honneur de faire beaucoup pour sa gloire si nous cherchons des stratagèmes et des soutiens charnels.

— Je te dis que tu es trop rigide.

— Tel n’est point mon avis.

— Ne m’empêche pas de gagner à notre parti un jeune homme dont le nom seul fera sortir de terre des légions pour soutenir la bonne cause.

— Fais ce que tu voudras.

Débarrassé du fougueux prédicateur, Burley vint rejoindre son prosélyte. John Balfour de Kinloch, ou Burley, était d’une bonne famille du comté de Fife, et possédait une assez belle fortune. Il avait adopté le parti des armes dès ses premières années, et avait passé sa jeunesse dans des excès de toute nature ; mais de bonne heure il avait renoncé à la débauche, et embrassé les dogmes les