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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

idée fut qu’il lui serait impossible de résister à une troupe qui avait suffi pour triompher du régiment de Claverhouse.

— Malheur à nous, mon frère ! s’écria-t-elle. À quoi servira tout ce que nous pourrons faire ? Ils détruiront mon château ! ils tueront Edith. Le mieux ne serait-il pas de nous soumettre ?

— Ne vous effrayez pas, ma sœur ; la place est forte, l’ennemi ignorant et mal armé. La maison de mon frère ne deviendra pas une caverne de brigands et de rebelles. Mon bras est plus faible qu’autrefois ; mais, grâce à mes cheveux blancs, j’ai quelque connaissance de la guerre. Ah ! voici Pique qui nous apporte des nouvelles. — Eh bien, qu’avez-vous appris ?

— Eh bien, dit Pique avec un grand sang-froid, déroute complète.

— Qui avez-vous vu ? Qui vous a donné cette nouvelle ?

— Une demi-douzaine de dragons qui fuient du côté d’Hamilton.

— Continuez vos préparatifs, Harrison ; — Gudyil, faites tuer autant de bœufs que vous pourrez en saler. Envoyez à la ville, et faites-en rapporter de la farine. Ne perdez pas un seul instant. — Ma sœur, vous feriez peut-être bien de vous retirer à Charnwood avec ma nièce, pendant que les chemins sont encore libres.

— Non, mon frère ; puisque vous croyez que mon vieux château peut tenir contre les rebelles, je ne le quitterai point. J’y resterai, dussé-je y trouver la fin de mon pélerinage sur cette terre.

— Après tout, c’est peut-être le parti le plus sûr pour Edith et pour vous. Cette affaire va être le signal d’une insurrection générale des presbytériens d’ici à Glascow, et à Charnwood vous pourriez courir encore plus de dangers qu’ici.

— Mon frère, comme vous êtes le plus proche parent de défunt mon époux, je vous investis, par ce gage (elle lui remit la vénérable canne à pomme d’or qui avait appartenu à son père le comte de Tornwood) du commandement du Château de Tillietudlem ; et je me flatte que vous défendrez convenablement une place dans laquelle Sa Majesté le roi Charles II ne dédaigna pas…

— C’est bon, ma sœur ; nous n’avons pas le temps de parler du roi et de son déjeuner.

Le major sortit, et courut examiner les moyens de défense de la place.

Des précipices et des rochers escarpés rendaient le château de Tillietudlem inaccessible de trois côtés ; le seul par où il fût abordable était entouré de murailles très épaisses, et précédé d’une cour fermée par d’autres remparts flanqués de tourelles et crénelés. Au milieu de l’édifice s’élevait une tour qui dominait tous les environs, et sur la plate-forme de laquelle se trouvaient quelques vieilles pièces de siège et d’autres petits canons. On était donc