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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

moyenne justice, et par conséquent si le coupable devait être exécuté sur mes terres (ce que je considère comme peu honnête, puisque ce château n’est habité que par des femmes,) il aurait dû le remettre entre les mains de mon bailli pour que mon bailli présidât à l’exécution.

— La loi martiale fait taire toutes les autres, ma sœur, interrompit le major. Je conviens cependant que le colonel n’a pas apporté l’attention convenable à votre demande : et je ne suis pas très flatté moi-même qu’il ait refusé à un vieux serviteur du roi, tel que moi, une grâce qu’il a accordée au jeune Evandale. Je prétends passer la journée avec vous, ma sœur, je veux avoir des nouvelles de cette affaire de Loudon-Hill. Cependant je ne puis croire qu’un attroupement de paysans tienne devant un régiment comme celui que nous avons vu ce matin. Ah ! il fut un temps où je n’aurais pu rester tranquillement assis dans un fauteuil, quand je savais qu’on se battait à dix milles de moi.

— Nous serons enchantées que vous restiez avec nous ; mais, quoiqu’il ne soit pas très poli de vous laisser seul, il faut que vous me permettiez de veiller à ce qu’on rétablisse l’ordre dans le château.

— Je hais la cérémonie comme je déteste un cheval qui bronche. D’ailleurs, votre personne resterait avec moi, que votre esprit serait avec les débris du déjeuner. — Où est Edith ?

— Dans sa chambre. Elle est incommodée d’un mal de cœur, je crois qu’elle s’est mise au lit. Dès qu’elle s’éveillera, je lui ferai prendre des gouttes cordiales.

— Bah ! bah ! elle n’a d’autre mal que la peur que lui ont causée les soldats. Elle n’est pas habituée à voir un jeune homme de sa connaissance emmené pour être fusillé ; un autre partir tout à coup, sans savoir si on le verra revenir. Mais si la guerre civile se rallume, il faudra bien qu’elle s’y accoutume.

— À Dieu ne plaise, mon frère !

— Oui, à Dieu ne plaise ! — Mais qu’on appelle Harrison, je ferai une partie de trictrac avec lui.

— Oh ! dit Gudyil, il est sorti à cheval pour tâcher d’avoir quelque nouvelle de la bataille.

— Au diable la bataille ! s’écria le major, elle a mis le désordre dans tout le château. On dirait qu’on n’en a jamais vu dans ce pays. On se souvient pourtant de celle de Kilsythe, John.

— Et de celle de Tippermuir, monsieur le major.

— Et de celle d’Altford, où je commandais la cavalerie.

Ayant une fois entamé le sujet des campagnes de Montrose, le major et Gudyil tinrent assez longtemps en échec ce formidable