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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

Comme Claverhouse l’avait prévu, la troupe de lord Evandale, qui s’était jetée impétueusement dans le marais, ne tarda pas à être arrêtée par les difficultés du terrain. Quelques dragons cherchaient à pousser en avant vers le fossé, la plupart se jetaient sur les côtés, dans l’espoir de gagner un sol plus ferme. Enfin, dès qu’ils furent arrivés à portée de fusil, le feu des insurgés en fit tomber une vingtaine. Quant à lord Evandale, il était parvenu à se frayer un passage : mais aussitôt il fut chargé avec fureur par la cavalerie qui tenait la gauche des insurgés : — Malheur aux Philistins incirconcis ! s’écriaient ces fanatiques.

Le jeune capitaine combattit comme un lion ; mais la plupart de ses dragons furent tués, et il aurait eu le même sort, si Claverhouse, arrivant au bord du fossé avec le reste de son monde, n’eût fait diriger un feu bien nourri sur l’ennemi, qui fut obligé de plier. Evandale profita de ce répit pour se dégager, et rejoignit le colonel.

Cependant les chefs des insurgés avaient compris tous leurs avantages, et ils étaient convaincus qu’avec du courage et de la persévérance ils resteraient infailliblement victorieux. Parcourant donc les rangs de leurs soldats, ils les exhortaient à tenir ferme.

Claverhouse réitéra ses tentatives pour passer le fossé ; mais lorsqu’il en eut reconnu l’inutilité, — Il faudra battre en retraite, dit-il à lord Evandale, à moins que la diversion entreprise par Bothwell ne réussisse. En attendant, faites retirer le régiment hors de portée.

Ces ordres ayant été exécutés, Claverhouse attendait avec impatience l’instant où Bothwell commencerait son attaque ; mais Bothwell avait aussi à vaincre bien des difficultés : son mouvement n’avait pas échappé à la pénétration de Burley, qui en fit exécuter un semblable par le corps de cavalerie de l’aile droite ; de sorte que, lorsque le brigadier eut tourné le marais, il rencontra des forces triples.

Sans se laisser arrêter par cet obstacle inattendu : — En avant, mes amis ! s’écria-t-il. — Puis, comme inspiré par l’esprit de ses ancêtres, il poussa leur cri de guerre : — Bothwell ! — chargea avec impétuosité la cavalerie ennemie, la força de reculer et tua trois hommes de sa main.

Prévoyant les suites funestes qu’entraînerait pour son parti un échec sur ce point, et sentant combien les troupes régulières ont d’avantages, même sur le nombre, Burley courut à Bothwell, et l’attaqua corps à corps. Chacun des combattants était regardé comme le principal champion de sa troupe, et il en résulta un événement plus rare dans l’histoire que dans les romans : des deux côtés les soldats s’arrêtèrent, comme si de l’issue de ce combat singulier dépendait celle de la bataille. Bothwell et Burley semblaient partager la même opinion ; car, après s’être mesurés quel-