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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

pas ainsi, miss Édith ; qui sait ce qui peut arriver ? Le jeune Morton est un brave gentilhomme, d’une bonne naissance ; on ne le traitera pas comme ces pauvres whigs qu’on arrête dans les marais pour les pendre sans cérémonie. Son oncle est riche, et avec de l’argent il peut le tirer d’affaire ; votre oncle pourrait aussi parler pour lui.

— Vous avez raison, Jenny ; c’est le moment d’agir, et non de se livrer au désespoir. Il faut que vous trouviez quelqu’un qui porte ce soir même une lettre à mon oncle.

— À Charnwood, Milady ! à l’heure qu’il est ! Songez-vous qu’il y a plus de six milles ? Je ne sais si un homme pourrait entreprendre d’y aller. Pauvre Cuddy ! s’il était ici ! Je n’avais qu’un mot à lui dire, et il partait sans demander ni pour qui ni pourquoi.

— Il faut, Jenny, que vous trouviez quelqu’un ; il y va de la mort ou de la vie.

— J’irais volontiers moi-même. Mais la route est dangereuse ; il y a tant d’Habits-Rouges qui rôdent çà et là, sans parler des whigs qui ne valent guère mieux (les jeunes gens du moins), s’ils rencontrent une fille dans les marais. Ce n’est pas la longueur du chemin qui m’effraie ; je ferais dix milles au clair de lune.

— Ne sauriez-vous trouver quelqu’un qui par charité ou pour de l’argent me rendrait ce service ?

— Je ne sais trop à qui m’adresser, répondit la suivante après avoir réfléchi un moment ; je crois bien que Gibby se chargera de cette commission ; mais il ne connaît peut-être pas assez le chemin, quoiqu’il ne soit pas très difficile, ou bien encore s’il n’est emmené aux montagnes par les whigs, ou conduit en prison par les Habits-Rouges,

— Il faut en courir la chance si vous ne trouvez pas un plus sûr messager. Allez donc le trouver sur-le-champ ; qu’il se prépare à partir secrètement. S’il rencontre en route quelqu’un qui l’arrête, qu’il dise qu’il porte une lettre au major Bellenden à Charnwood, mais sans ajouter de quelle part.

— J’entends. Le petit drôle s’en trouvera bien. Tibbie, la fille de basse-cour aura soin des oies, et je promettrai à Gibby que vous ferez sa paix avec lady Margaret ; puis nous lui donnerons un dollar.

— Dites-lui qu’il en aura deux.

Pendant que Jenny allait éveiller Gibby, qui se couchait ordinairement avec le soleil, Édith écrivit au major.


« Mon cher oncle, je désire avoir des nouvelles de votre santé : je crains que votre goutte ne vous tourmente, et nous avons été