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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

Marguerite, il dit qu’ayant encore une marche de plusieurs milles à faire avant la nuit, il la priait de trouver bon que sa troupe fît reposer ses chevaux une heure dans son château.

— Avec grand plaisir, répondit la noble dame ; mes gens veilleront à ce qu’ils ne manquent de rien, et j’espère que pendant ce temps, vous et vos cavaliers vous accepterez quelques rafraîchissements.

— Personne n’ignore, Milady, que c’est toujours ainsi que les serviteurs du roi sont reçus dans les murs de Tillietudlem.

— En toute occasion, je tâche de m’acquitter de mes devoirs avec honneur et loyauté. Il n’y a pas encore bien longtemps, monsieur le brigadier, que Sa Majesté le roi a daigné honorer mon château de sa présence et accepter à déjeuner.

Bothwell avait fait mettre pied à terre à sa troupe ; rien ne l’empêchait donc de continuer la conversation que la dame du manoir avait eu la condescendance de commencer. Il reprit : — Puisque le roi mon maître, Milady, a eu l’avantage d’avoir des preuves de votre hospitalité, je ne m’étonne pas que votre hospitalité s’étende à tous ceux qui le servent. Au surplus, j’appartiens à Sa Majesté de plus près que ce grossier habit rouge ne semblerait l’indiquer.

— Vraiment ! vous avez peut-être fait partie de sa maison ?

— Oui, de sa maison, mais non dans le sens que vous entendez, Milady, et j’ai par là le droit de me vanter d’être allié aux plus nobles familles d’Écosse, à celle de Tillietudlem peut-être.

— Je ne vous comprends pas, dit lady Marguerite relevant majestueusement la tête en entendant un propos qu’elle regardait comme une plaisanterie déplacée,

— Dans ma situation, Milady, c’est peut-être folie à moi de rappeler ce souvenir ; mais vous avez dû entendre parler de mon aïeul Francis Stuart, à qui Jacques Ier, son cousin germain, donna le titre de comte de Bothwell, que mes camarades m’ont donné aussi par sobriquet. Sa vie fut un long enchaînement de malheurs, et son nom ne m’a pas été plus profitable.

— En vérité ! dit lady Bellenden d’un ton de surprise, j’avais bien ouï dire que le petit-fils de cet homme célèbre n’était pas dans une situation convenable à sa naissance ; mais j’étais éloignée de croire qu’il fût si peu avancé dans le service. Comment se peut-il que la fortune ait traité si mal un homme qui a une telle parenté ?

— Tout cela est dans le cours ordinaire des choses, Milady. J’ai eu quelques moments de bonne fortune comme mes voisins ; j’ai vidé plus d’une bouteille avec Rochester ; j’ai fait plus d’une partie avec Buckingham ; j’ai combattu à Tanger avec Sheffield ; mais