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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

cave, et du diable s’il y en a une qu’on puisse envoyer à sa place.

— Mais qu’est-ce que cela ? dit-il en prenant une fourchette pour pêcher un morceau de mouton qui nageait encore dans le brouet.

— C’est de la cuisine du diable ; il faut des dents de fer pour y mordre.

— Je voudrais avoir quelque chose de meilleur à vous offrir, lui dit Milnwood alarmé de ces paroles de mécontentement.

— Non, non, je n’ai pas le temps de manger ; procédons à notre affaire. — Monsieur Morton, est-ce du ministre presbytérien Poundtext que vous suivez les instructions ?

M. Morton se hâta de répondre apologétiquement : — Oui, parce qu’il a obtenu de Sa Majesté et du conseil privé, en se soumettant aux réglements, l’autorisation de continuer ses fonctions, car je ne voudrais rien faire qui fût contraire aux lois. Je n’ai aucune objection contre l’établissement d’un épiscopat modéré, si ce n’est que je suis un simple campagnard, que nos ministres sont des gens plus simples, ce qui me permet de suivre plus facilement leurs doctrines : puis, sauf votre respect, Monsieur, le culte des presbytériens est plus économique pour le pays.

— Bon ! bon ! ils sont autorisés : tout est dit. Pour ma part, si c’était moi qui faisais la loi, jamais un chien tondu de toute la meute n’aboierait dans une chaire d’Écosse. — Mais je suis fait pour obéir. — Ah ! voici la liqueur. — Versez, ma bonne vieille.

Bothwell décanta dans une grande tasse de bois le quart d’une bouteille de vin de Bordeaux, et l’ayant goûté : Voulez-vous me faire raison ? À la santé du roi !

— Avec plaisir, répondit le vieillard ; mais ce sera avec de l’ale, car je ne bois jamais de vin de Bordeaux, et je n’en ai un peu que pour pouvoir en offrir à quelques honorables amis.

— Comme moi, je suppose, dit Bothwell ; et passant la bouteille à Henry ; — Eh bien ! jeune homme, me ferez-vous raison ? À la santé du roi !

Henry remplit son verre modérément, sans faire attention aux coups de coude de son oncle, qui lui faisait signe de s’en tenir à la bière comme il l’avait fait lui-même.

— Tout le monde a-t-il bu à cette santé ? demanda Bothwell. Qu’est-ce que c’est que cette vieille femme-là ? donnez-lui un verre d’eau-de-vie, elle boiera aussi à la santé du roi, pardieu !

— N’en déplaise à Votre Honneur, répondit Cuddy, c’est ma mère, et elle est sourde. Mais si vous voulez, je boirai pour elle à la santé du roi autant de verres d’eau-de-vie qu’il vous plaira.

— Sur mon âme ! vous m’avez tout l’air d’un homme qui aime le brandevin. — Sers-toi ! allons ; camarade, point de gêne. — Tom,