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L’apparition

— Oui, ou le bout de chandelle, si le vent voulait ne pas en faire vaciller la flamme, dit la troisième. À sa place, j’aurais préféré rapporter un corbeau, plutôt que de revenir trois fois au logis sans la corne d’un chevreuil pour souffler dedans. »

Hobbie se tournait vers l’une et l’autre, les regardant alternativement avec un froncement de sourcil dont l’augure était démenti par le sourire de bonne humeur qu’il s’efforçait de faire paraître sur ses lèvres. Il chercha ensuite à les apaiser en leur annonçant le présent qu’Earnscliff se proposait de leur faire.

« Dans ma jeunesse, dit la vieille dame, un homme aurait eu honte de revenir de la montagne sans avoir eu un chevreuil pendu de chaque côté de sa selle, comme un coquetier qui porte des veaux.

— Je voudrais alors qu’ils nous en eussent laissé quelques-uns, ma chère grand’mère, répliqua Hobbie mais ils ont probablement dépeuplé tout le pays, vos vieux amis ?

— Vous voyez cependant qu’il y a d’autres personnes qui savent en trouver, Hobbie », dit la sœur aînée en jetant un coup d’œil sur Earnscliff.

« Hé bien ! hé bien ! femme, chaque chien n’a-t-il pas son jour ? Earnscliff me pardonnera d’employer ce vieux proverbe. Ne puis-je avoir son bonheur et lui ne peut-il éprouver mon malheur une autre fois ? C’est loin d’être agréable pour un homme qui a couru toute la journée et qui a été effrayé… Non, je ne veux pas dire cela non plus, mais surpris par des esprits, en revenant à la maison, d’avoir encore à se débattre contre une troupe de femmes qui, toute la journée, n’ont eu qu’à faire tourner un morceau de bois attaché à un fil, ou à faire des trous à un tablier de cuisine…

— Effrayé par des esprits ! » s’écrièrent à la fois toutes les femmes qui alors, comme le sont peut-être encore aujourd’hui les habitants de ces vallées,