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Le Nain Noir

de pistolet. C’eût été une folie de vouloir persister dans ses tentatives à l’égard d’un être qui était ainsi armé et tenait un langage aussi déterminé, voyant surtout qu’il avait bien peu de secours à attendre de la part de son compagnon, qui l’avait abandonné, lui laissant le soin de se débattre comme il le pourrait avec l’être mystérieux, et qui avait déjà repris le chemin de sa maison. Earnscliff se tourna donc et suivit Hobbie, en jetant derrière lui un regard sur celui qu’il regardait comme un maniaque, et qui, comme si cette entrevue l’eût poussé jusqu’à la frénésie, continuait son étrange promenade autour de la colonne, et s’épuisait à pousser des cris aigus et à vomir des imprécations prolongées qui retentirent dans toute la vaste étendue de ce désert.

Les deux chasseurs se retirèrent en silence, jusqu’à ce qu’ils n’entendissent plus ces sons désagréables, c’est-à-dire jusqu’à ce qu’ils fussent bien éloignés de la colonne qui avait donné son nom à l’endroit où elle était élevée. Chacun fit ses commentaires particuliers sur la scène dont il venait d’être témoin, et Hobbie Elliot rompit enfin le silence en s’écriant tout à coup : « Eh bien ! je soutiens que cet esprit, si toutefois c’en est un, a fait et souffert beaucoup de mal lorsqu’il était en vie, puisqu’il est obligé d’errer ainsi après sa mort.

— C’est, à mes yeux, la vraie rage de la misanthropie, » dit Earnscliff, en continuant le cours de ses propres réflexions.

« Vous n’avez donc pas cru que ce fût un esprit ? demanda Hobbie.

— Qui ? moi ? non, assurément, répondit le jeune laird.

— Eh bien ! moi, je crois que ce pourrait bien être une créature vivante. Et cependant, je n’oserais l’affirmer, car je n’ai jamais rien vu qui ressemblât si fort à un revenant.

— Quoi qu’il en soit, dit Earnscliff, je reviendrai