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Le Miroir de ma Tante Marguerite

gorie que lady Bothwell et sa sœur avaient vue. Cependant il était si difficile d’expliquer positivement la chose, que, jusqu’à sa mort, elle en conserva des doutes, et souvent même elle fut tentée de couper le nœud gordien, en admettent l’existence d’un pouvoir surnaturel.

— Mais, ma chère tante, que devint cet homme habile ?

— Oh ! c’était un trop habile devin pour ne pas prévoir que sa propre destinée serait tragique s’il attendait l’arrivée de l’homme qui portait un lévrier en argent sur sa manche[1]. Il disparut sans qu’on sût où il s’était enfui, et on n’entendit plus parler de lui. Il courut le bruit que quelques papiers ou lettres avaient été trouvés chez lui ; mais bientôt on ne parla pas plus de Battisto d’Amiotti que de Galien ou d’Hippocrate.

— Et sir Philippe disparut-il aussi ? ne fut-il plus question de lui ?

— Non », répondit ma complaisante narratrice, « on en entendit parler encore une fois, et ce fut dans une circonstance assez remarquable : on disait que nous autres Écossais, lorsqu’existait une belle nation, nous possédions de nombreuses vertus, un ou deux légers vices, mais surtout celui de ne jamais pardonner et de ne jamais oublier les injures : que nous nous faisons une idole de notre ressentiment comme la pauvre lady Constance[2] s’en fit une de son chagrin, et enfin, comme le dit le poëte Burns, que nous avons coutume de nourrir notre colère pour lui conserver sa chaleur[3].

« Lady Bothwell partageait ces sentiments, et je crois que rien au monde, excepté la restauration des

  1. Signe distinctif de l’agent de police on du messager du roi d’Angleterre. A. M.
  2. Personnage d’une des pièces de Shakspeare. A. M.
  3. Nursing our wrath to keep it warm.