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Le Nain Noir

L’homme content de peu sait dormir sans faiblesse,
Le superflu ne sert qu’à hâter la vieillesse.

Dans le cours de la soirée, le Nain Noir[1] ne fut pas oublié, et le vieux berger Bauldie conta plusieurs histoires à ce sujet, qui excitèrent beaucoup

  1. Le Nain Noir, presque oublié maintenant, était autrefois regardé comme un personnage formidable par les Dalesmen (les habitants des vallées) du Border (de la frontière), qui l’accusaient de tout le mal qui arrivait à leurs moutons et à leur bétail. « C’était, » dit le docteur Leyden, qui lui fait jouer un très grand rôle dans la ballade intitulée le Cowt de Ceeldar, « un démon ou esprit-fée de la race la plus malfaisante, un vrai Duergard du Nord. » Ce que l’on raconte de mieux et de plus authentique au sujet de cet être dangereux et mystérieux se trouve dans une historiette communiquée à l’auteur par cet éminent antiquaire, Richard Surtees, écuyer, demeurant à Mainsfort, auteur de l’histoire de l’évêché de Durham.

    Selon cette légende très bien attestée, deux jeunes gens du Northumberland, étant à faire une partie de chasse, s’enfoncèrent fort avant au milieu des montagnes et des marécages qui longent la frontière du Cumberland. Ils s’arrêtèrent pour prendre quelques rafraîchissements, dans un vallon solitaire, au bord d’un petit ruisseau. Après avoir satisfait leur appétit en mangeant ce qu’ils avaient apporté, l’un d’eux s’endormit ; l’autre, ne voulant pas troubler le repos de son ami, s’éloigna sans faire de bruit, dans le dessein d’observer les objets qui étaient aux environs. Tout à coup, à son grand étonnement, il se trouva tout près d’un être qui paraissait ne pas appartenir à notre monde, le nain le plus hideux que le soleil eût jamais éclairé. Sa tête était aussi grosse que celle d’un homme fait, ce qui formait un contraste effrayant avec sa taille, qui était de beaucoup au-dessous de quatre pieds. Elle n’avait d’autre couverture que de longs cheveux nattés, ressemblant pour l’épaisseur aux soies du blaireau, et pour la couleur, qui était d’un brun rougeâtre, à la fleur de la bruyère. Ses membres sem-