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Le Nain Noir

— Monsieur Ratcliffe, dit miss Vère, vous avez toujours passé pour un homme d’honneur et de probité, et le malheureux qui se noie est toujours prêt à saisir le plus faible rameau… Je mets en vous toute ma confiance ; je veux suivre vos conseils… je me rendrai à la porte du jardin. »

Elle tira les verroux de la porte extérieure de son appartement aussitôt que M. Ratcliffe l’eut quittée, et descendit dans le jardin par un escalier qui communiquait à son cabinet de toilette. Dans sa marche, elle se sentit portée à rétracter le consentement qu’elle avait si précipitamment donné à une démarche aussi hasardée et aussi extravagante. Mais, dans ce moment où en descendant elle passait devant une porte particulière qui donnait dans la chapelle, elle entendit la voix des servantes occupées à la mettre en état.

« Mariée ! et à un homme aussi détestable ! ah, grand Dieu ! tout au monde plutôt qu’un tel mariage ? »

« Elles disent vrai… elles ont raison, dit miss Vère ; tout au monde plutôt… »

Elle traversa rapidement le jardin. M. Ratcliffe fut exact au rendez-vous ; les chevaux se trouvèrent prêts à la porte du jardin, et quelques minutes après les deux voyageurs se trouvèrent en marche vers la hutte du solitaire.

Tant qu’ils n’eurent qu’une plaine à parcourir, la rapidité de la course leur offrit peu d’occasions de se communiquer leurs idées ; mais lorsqu’un terrain escarpé les obligea à ralentir leur marche, un nouveau motif de crainte vint se présenter à l’esprit de miss Vère.

« Monsieur Ratcliffe », dit-elle en tirant la bride de son cheval, « ne poussons pas plus loin un voyage que rien que l’extrême agitation de mon esprit ne peut me laver du reproche d’avoir entrepris. Je n’ignore pas que cet homme passe, dans le bas peu-