Page:Scott - Le nain noir, Le miroir de ma tante Marguerite, trad Montémont, 1916.djvu/162

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
160
Le Nain Noir

— Vous auriez dû dire moi et non pas nous, lorsque vous parlez de priorité dans une pareille trahison ; quant à moi, je ne ferai pas enregistrer mon cheval pour chercher à gagner le prix », dit Mareschal ; puis il ajouta entre ses dents : « Un joli coup d’amis, vraiment, pour lui donner sa tête à garder !

— On ne m’intimidera, jamais au point de m’empêcher d’agir selon que je le jugerai convenable, dit sir Frédéric Langley, et la première chose que je ferai sera de quitter Ellieslaw. Je n’ai pas de motif », ajouta-t-il en regardant M. Vère, « qui m’engage à tenir ma parole envers celui qui ne m’a pas tenu la sienne.

— En quoi », dit Ellieslaw, en imposant silence par un geste à son impétueux cousin, « en quoi vous ai-je manqué de parole, sir Frédéric ?

— En ce que j’avais de plus cher et de plus tendre, répondit sir Frédéric. Vous m’avez joué pour cette alliance projetée qui, comme vous le savez fort bien, était le gage de notre liaison politique. Cet enlèvement, et ce retour de miss Vère ; l’accueil glacé qu’elle m’a fait, et les excuses dont vous avez voulu le couvrir, tout cela n’est que pure évasion, un prétexte pour conserver vous-même la possession des biens qui lui appartiennent de droit, et pendant ce temps-là, faire de moi un instrument pour votre entreprise sans ressources, en me donnant des espérances que vous êtes bien résolu à ne jamais réaliser.

— Sir Frédéric, dit Ellieslaw, je vous proteste partout ce qu’il y a de plus sacré…

— Je n’écoute plus de protestations ; j’en ai été trop longtemps la dupe.

— Si vous nous abandonnez, dit Ellieslaw, vous savez fort bien que votre ruine est aussi sûre que la nôtre ; l’union fait notre force.

— Laissez-moi le soin de pourvoir à ma propre sûreté, répondit Frédéric ; mais quand même ce que vous dites serait vrai, j’aimerais mieux périr que d’être votre jouet plus longtemps.