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Le Nain Noir

riches indolents, qui, trop nonchalants pour s’occuper de leurs propres affaires, sont bien aises de s’en décharger sur un autre, cependant on le voyait dans plusieurs circonstances renoncer à son propre jugement pour se soumettre aux opinions contraires de M. Ratcliffe qui n’hésitait pas à les exprimer franchement.

M. Vère ne paraissait jamais plus mortifié que lorsque des étrangers faisaient quelque observation sur l’espèce de tutelle sous laquelle il paraissait vivre. Lorsque sir Frédéric ou quelque autre de ses amis lui en parlait, tantôt il repoussait la remarque avec hauteur et indignation, tantôt il évitait une explication directe, en disant, avec un sourire forcé : « Que M. Ratcliffe connaissait son importance, mais que personne au monde n’était plus honnête et plus habile, et qu’il lui serait impossible de conduire ses affaires avec l’Angleterre sans ses avis et son secours. »

Tel était le personnage qui entra dans l’appartement, au moment où M. Vère le faisait appeler auprès de lui, et qui entendit, avec une surprise évidemment mêlée d’incrédulité, le récit qui lui fut fait à la hâte de ce qui était arrivé à Isabelle.

« Maintenant, mes amis », dit M. Vère en s’adressant à sir Frédéric et aux autres personnes qui l’entouraient, et qui étaient toutes plus surprises les unes que les autres ; « vous voyez le père le plus malheureux de l’Écosse. Prêtez-moi votre secours, messieurs ; donnez-moi votre avis, monsieur Ratcliffe. Après un événement aussi malheureux, je suis incapable d’agir, ou de penser.

— Montons à cheval, prenons nos domestiques et parcourons la campagne, à la poursuite des brigands, dit sir Frédéric.

— N’y a-t-il personne que vous puissiez soupçonner », dit gravement Ratcliffe, « d’avoir eu quelque motif de commettre cet étrange attentat ? Nous ne