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Introduction

sujet de sa famille, elle répondait avec le même sentiment de mauvaise humeur et d’impatience.

L’auteur vit ce pauvre, et l’on peut dire, malheureux individu dans le courant de l’automne de 1797. Étant alors, comme il a le bonheur de l’être encore, intimement lié avec la famille du vénérable docteur Adam Ferguson, le philosophe et l’historien, qui résidait à cette époque à la maison seigneuriale du Halyards, dans la vallée de Manor, à environ un mille de l’ermitage de Ritchie, l’auteur se trouvait à Halyards, où il passa quelques jours, pendant les quels il fit la connaissance de ce singulier anachorète, que le docteur Ferguson regardait comme un personnage extraordinaire, à qui il rendait service de diverses manières, et à qui il prêtait, de temps en temps, quelques livres. Quoique le goût du philosophe et celui du paysan ne s’accordassent pas toujours ensemble, comme on peut bien se l’imaginer, cependant le docteur Ferguson le considérait comme un homme d’une grande capacité et plein d’idées originales, mais dont l’esprit avait été entraîné hors de sa pente naturelle et juste par un excès d’amour-propre et de ténacité d’opinion, rendu plus violent par le sentiment amer du ridicule et du mépris, et vindicatif contre la société, du moins en idée, par une farouche misanthropie.

Davie Ritchie, outre qu’il a vécu dans une obscurité totale, était mort depuis plusieurs années, lorsque l’auteur conçut l’idée de faire de ce personnage le héros d’un roman. En conséquence, il esquissa le caractère d’Elshie de Mucklestane-Moor. La narration devait être plus longue, et la catastrophe amenée avec plus d’art ; mais un critique de mes amis, au jugement de qui je soumis l’ouvrage, pendant que j’y travaillais encore, fut d’avis que l’idée que je donnais du solitaire était d’un genre trop révoltant et dégoûterait le lecteur au lieu de l’intéresser. Comme j’avais des raisons de croire que celui que