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Grâce retrouvée

tons que dans aucune des saisons précédentes[1], Et puis j’ai ouï dire qu’il se servait de paroles si offensantes envers les hommes, que c’est insulter la Providence elle-même. Souvenez-vous que vous dites vous-même, la première fois que vous le vîtes, qu’il ressemblait plutôt à un fantôme qu’à un être vivant.

— Laissez donc, ma mère, dit Hobbie, Elshie n’est pas aussi mauvais que cela. Il est vrai que son corps tout difforme n’est pas un objet fort agréable à voir, et que son langage est rude ; mais il n’est pas aussi dangereux en effets qu’en paroles. Si j’avais quelque chose à manger, car je n’ai rien pris de toute la journée, je me coucherais pour deux ou trois heures à côté de mon cheval, et demain, au point du jour, je partirais pour Mucklestane.

— Et pourquoi pas ce soir ? dit Henri ; j’irai avec vous.

— Mon cheval est fatigué, répondit Hobbie.

— En ce cas vous pouvez prendre Le mien, dit John.

— Mais je suis moi-même très-fatigué », dit Hobbie en insistant.

« Vous, fatigué ! dit Henri ; fi donc ; je vous ai vu rester en selle pendant vingt-quatre heures de suite sans jamais prononcer ce mot.

— La nuit est bien obscure », dit Hobbie en regardant par la fenêtre de la chaumière ; « mais, à parler franchement, quoique Elshie soit réellement un brave homme, cependant j’aime mieux qu’il fasse grand jour quand je vais lui faire une visite. »

Cette franchise de la part de Hobbie empêcha toute discussion ultérieure ; conciliant ainsi la trop grande précipitation du conseil de son frère avec les

  1. Le texte dit moor-ill et louping-ill. La première de ces maladies cause des tourments aigus ; la seconde fait sauter l’animal comme s’il était ivre. A. M.