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— Il faut, dit l’abbé, que vos vœux s’accomplissent, digne franklin, ou plutôt, permettez-moi de le dire, digne thane, malgré l’ancienneté de ce titre. Les vœux sont des nœuds qui nous lient au ciel ; ce sont les cordes qui attachent la victime à l’autel, et ils doivent, par conséquent, je le répète, être accomplis, à moins que notre sainte mère l’Église n’ordonne le contraire. Quant à la langue, j’aime à converser dans celle que parlait ma respectable grand-mère Hilda de Middleham qui mourut en odeur de sainteté et qui égalait presque, si j’ose le dire, sa glorieuse homonyme, la bienheureuse Hilda de Whitby. Que Dieu protège son âme !

Lorsque le prieur eut achevé ce qu’il considérait comme un avant-propos conciliateur, son compagnon dit brièvement et avec emphase :

— Je parle toujours français, la langue du roi Richard et de ses nobles ; mais je comprends assez l’anglais pour communiquer avec les indigènes.

Cédric lança à l’interlocuteur un de ces regards rapides et courroucés que manquaient rarement de susciter les comparaisons faites entre les deux nations rivales. Mais, se rappelant les devoirs de l’hospitalité, il réprima toute marque extérieure de colère, et, de la main, il désigna à ses hôtes leurs places, un peu plus bas que la sienne, mais tout à ses côtés, et donna le signal d’apporter sur la table le repas du soir.

Tandis que les serviteurs s’empressaient d’obéir aux ordres du maître, celui-ci aperçut Gurth, le porcher, qui, avec son compagnon Wamba, venait d’entrer dans la salle.

— Envoyez ces fainéants par ici ! cria le Saxon avec impatience.

Et, lorsque les coupables furent devant lui :

— Comment se fait-il, coquins ! leur dit-il, que vous ayez tant tardé ? As-tu ramené ton troupeau à la maison, maître Gurth, ou l’as-tu abandonné aux bandits et aux maraudeurs ?

— Le troupeau est en sûreté, s’il vous plaît, dit Gurth.