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Le grand maître, qui tenait en main le gage de la bataille, le gant de Rébecca, le jeta dans l’arène, et prononça le fatal signal :

Laissez aller !

Les trompettes sonnèrent, et les chevaliers s’élancèrent l’un contre l’autre. Le cheval épuisé d’Ivanhoé et son cavalier non moins épuisé par la fatigue ne purent résister à la lance bien dirigée du templier et à la vigueur de son coursier. Les assistants avaient prévu ce résultat ; mais, quoique la lance d’Ivanhoé eût à peine atteint le bouclier de Bois-Guilbert, celui-ci, au grand étonnement de tous, chancela sur sa selle, perdit les étriers et roula dans l’arène.

Ivanhoé se releva sur-le-champ et mit l’épée à la main ; mais son adversaire ne se releva pas. Le pied sur la poitrine et la pointe de son épée sur la gorge, Wilfrid lui ordonna de se rendre s’il ne voulait recevoir le coup de la mort.

Mais Bois-Guilbert ne répondit pas.

— Ne le tuez pas sans confession, sire chevalier, cria le grand maître ; ne faites pas périr à la fois son corps et son âme ! Nous le déclarons vaincu.

Il descendit dans la lice et ordonna de dénouer le casque du champion terrassé. Ses yeux étaient fermés et le sang affluait encore à son visage. Les spectateurs, qui contemplaient Bois-Guilbert avec étonnement, virent ses yeux se rouvrir, mais ils restèrent fixes et ternes. Le sang se retira tout à coup et fit place à la pâleur de la mort.

Sans être touché par la lance de son ennemi, il était mort victime de la violence de ses passions.

— C’est véritablement le jugement de Dieu, dit le grand maître en levant les yeux au ciel. Fiat voluntas tua !