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IVANHOÉ.

Il ne manquait dans cette foule bigarrée ni de bouffons ni de jongleurs, et dans cette funèbre occasion l’assemblée les suivait des yeux sans voir dans l’exercice de leur profession rien d’indécent ni d’intempestif.

À la vérité, les idées des Saxons, en de telles occurrences, étaient aussi naïves qu’elles étaient grossières. Si la douleur avait soif, il fallait lui donner à boire ; si elle avait faim, il fallait lui donner à manger ; si elle attristait les cœurs, il fallait recourir aux moyens de se réjouir ou tout au moins de se distraire. Aussi les assistants ne manquaient-ils pas de profiter de ces diverses consolations qu’ils avaient sous la main, bien que, de temps en temps, comme s’ils se fussent souvenus tout à coup de la cause qui les avait réunis, les hommes se prissent à gémir de concert, tandis que les femmes, dont le nombre était grand, élevaient la voix et remplissaient l’air de cris lamentables.

Telle était la scène bizarre qui se passait dans la cour du château de Coningsburg lorsque Richard et sa suite y pénétrèrent. L’intendant ne daignait pas faire attention au groupe de gens inférieurs qui entraient et sortaient continuellement, si ce n’est pour le maintien de l’ordre ; mais il fut frappé de la bonne mine du monarque, et d’Ivanhoé surtout, croyant reconnaître les traits de ce dernier.

De plus, l’approche de deux cavaliers, qu’on reconnaissait bien pour tels à leur costume, était un événement rare dans une solennité saxonne, et fut nécessairement regardé comme un honneur rendu au défunt et à sa famille.

Vêtu de noir et tenant à la main la baguette blanche de son office, ce personnage important ouvrit un passage à travers la foule des visiteurs, et conduisit Richard et Ivanhoé jusqu’à l’entrée de la tour.

Gurth et Wamba trouvèrent bientôt des connaissances dans la cour, et ils se tinrent à l’écart, n’osant se présenter avant d’être appelés par leurs maîtres.