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IVANHOÉ.

garder de plus près ce même cor dont le souffle est si puissant.

Le chevalier ouvrit l’agrafe du baudrier et offrit le cor à son compagnon, qui le suspendit aussitôt à son cou.

Tra lira la, dit-il, tirant des sons de l’instrument, je connais ma gamme aussi bien qu’un autre.

— Que veux-tu dire, drôle ? répondit le chevalier. Rends-moi le cor de chasse.

— Ne craignez rien, beau chevalier, il sera bien gardé. Quand la valeur et la folie voyagent ensemble, c’est à la folie de porter le cor, parce que c’est elle qui en sonne le mieux.

— Wamba, s’écria le chevalier noir, ceci dépasse la permission. Garde-toi d’abuser de ma patience.

— Ne me poussez pas à bout non plus avec vos emportements, beau chevalier, reprit le bouffon en s’éloignant de quelques pas du champion irrité ; sans quoi, la folie vous montrera les talons et laissera la valeur chercher son chemin par ces bois du mieux qu’il lui sera possible.

— Allons, tu as frappé juste, s’écria le chevalier, et, à vrai dire, je n’ai guère le temps de me disputer avec toi. Garde le cor si tu veux, mais continuons notre route.

— Vous me promettez de ne pas me maltraiter ? demanda Wamba.

— Je te le promets.

— Donnez-m’en votre parole de chevalier, continua Wamba se rapprochant avec beaucoup de précaution.

— Je t’en donne ma parole de chevalier, fou que tu es ! seulement, ne perdons pas de temps et avançons.

— C’est bien ; en ce cas, la valeur et la folie sont encore une fois bons compagnons, dit le bouffon en revenant franchement aux côtés du chevalier. Mais, en vérité, je n’aimerais pas un coup de poing comme celui que vous avez donné au moine gaillard et qui a fait rouler Sa Sainteté sur la prairie comme le roi des neuf quilles ; et, maintenant que la folie porte le cor, je conseille à la valeur de se réveiller et de secouer sa crinière ; car, si je ne me trompe pas, il y