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IVANHOÉ.

sur le point de disparaître, qu’il céda enfin à sa curiosité.

— Douce jeune fille, dit-il en arabe, car ses voyages en Orient lui avaient rendu cette langue familière, et il pensait que cette charmante femme, ornée du turban et du cafetan, serait plus à même de comprendre cet idiome que tout autre ; je vous en prie, douce damoiselle, que votre courtoisie…

Mais il fut interrompu par son aimable médecin, et un sourire à peine réprimé dessina deux fossettes sur un visage dont l’expression habituelle était celle de la mélancolie et de la contemplation.

— Je suis Anglaise, messire chevalier, et je parle la langue anglaise, bien que mon costume et ma race appartiennent à un autre climat.

— Noble damoiselle… reprit de nouveau le chevalier Ivanhoé. Et, une seconde fois, Rébecca se hâta de l’interrompre.

— Ne me donnez pas, sire chevalier, dit-elle, l’épithète de noble. Il est bon que vous sachiez tout de suite que votre servante est une pauvre juive, la fille de cet Isaac d’York pour lequel vous vous êtes tout récemment montré un bon et indulgent seigneur. Il est de son devoir, et de ceux de sa maison, de vous rendre les soins assidus que réclame impérieusement votre état actuel.

Je ne sais si la belle Rowena eût été très satisfaite de l’espèce d’émotion avec laquelle son chevalier dévoué avait jusqu’alors contemplé les beaux traits, la taille svelte et les yeux brillants de l’aimable Rébecca, yeux dont l’éclat était ombragé, et pour ainsi dire adouci par une bordure de cils longs et soyeux, et qu’un ménestrel eût comparés à l’étoile du soir lançant ses rayons à travers un bocage de jasmins.

Mais Ivanhoé était trop bon chrétien pour conserver des sentiments de cette nature envers une juive. Rébecca avait prévu ce revirement, et c’est dans cette intention qu’elle s’était hâtée de lui faire connaître le nom et la caste de son