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tournait la tête de côté et d’autre ; or, comme il restait rarement une minute dans la même position, le bruit de ces clochettes était à peu près continuel.

Autour du bord de ce bonnet était une bande de cuir épais, dentelée à son sommet comme une couronne à pointes, tandis qu’un sac allongé s’échappait du fond et descendait sur les épaules comme un bonnet de coton, comme une chausse à passer le café, ou mieux la flamme d’un colback de hussard.

C’était à cette partie du bonnet de Wamba que l’on avait cousu les sonnettes, et cette circonstance, aussi bien que la forme de sa coiffure et l’expression moitié folle, moitié futile de sa figure, servait à le désigner comme appartenant à la classe des bouffons domestiques, ou railleurs, qu’on nourrissait dans les maisons des riches pour chasser l’ennui de ces heures languissantes qu’ils étaient obligés de passer dans leurs châteaux.

Comme son compagnon, il portait un panier attaché à la ceinture ; mais il n’avait ni corne ni couteau, parce que probablement on le regardait comme appartenant à une classe à laquelle il eût été dangereux de confier des outils tranchants. À la place de ce couteau, il était armé d’une latte semblable à celle avec laquelle Arlequin exécute ses prodiges sur nos modernes théâtres.

L’aspect extérieur de ces deux hommes ne formait pas un contraste plus opposé que celui de leur mine et de leur maintien. Celui du serf, ou de l’esclave, était triste et morne ; son regard était fixé sur la terre avec une expression de profond abattement, qui eût pu passer pour de l’apathie si le feu qui, de temps à autre, jaillissait de son œil rouge, n’eût attesté que sommeillait, sous l’apparence de ce morne anéantissement, la conscience de l’oppression et le désir de la vengeance.

Tout au contraire, la mine de Wamba indiquait, selon la coutume de la classe à laquelle il appartenait, une espèce de curiosité vive et une impatience inquiète qui ne lui per-