Page:Scott - Ivanhoé, trad. Dumas, 1874.djvu/223

Cette page a été validée par deux contributeurs.

engagée avec un rival à son retour, et à voir sa sérénade, comme on l’appelle, aussi mal reçue que le miaulement d’un chat dans la gouttière ? Néanmoins, messire chevalier, je bois encore cette coupe à toi et au bonheur de tous les vrais amants. Je crains que tu ne sois pas du nombre, ajouta-t-il en remarquant que le chevalier, dont la tête, grâce aux rasades répétées, commençait à s’échauffer, trempait son vin avec l’eau de la cruche.

— Comment ! demanda le chevalier, ne m’as-tu pas dit que cette eau venait de la fontaine de ton vénérable patron saint Dunstan ?

— Oui, vraiment, répondit l’ermite, et il y baptisa des centaines de païens ; mais jamais je n’ai entendu dire qu’il y eût seulement trempé sa lèvre. En ce monde, il faut que toute chose soit dirigée vers son propre emploi ; personne ne savait mieux que saint Dunstan les prérogatives d’un joyeux frère.

Et, là-dessus, il étendit la main vers la harpe, et régala son hôte de cette chanson caractéristique, modulée sur le refrain d’une espèce de derry down[1] qui se rencontre dans une vieille chanson anglaise :


le carme déchaussé.


Je te donnerai, bonhomme, une année ou deux
Pour chercher à travers l’Europe, depuis l’Espagne jusqu’à Byzance,
Et tu ne trouveras jamais, quelque étendue que soit la revue,
Un homme aussi heureux que le carme déchaussé.

Le chevalier se lance dans la carrière pour sa dame,
Et, le soir, on le ramène à la maison blessé.
Je le confesse en hâte, sa dame ne désire
Aucune consolation sur la terre, sauf celle du carme déchaussé.

  1. Tralala. Il faut rappeler au lecteur que le refrain de derry down passe pour être aussi ancien non seulement que l’époque de l’heptarchie, mais que celle des druides, et l’on dit que le même refrain a été employé par ces vénérables personnages dans leurs hymnes lorsqu’ils allaient dans la forêt cueillir le gui sacré.