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si merveilleusement contée au jour le jour, dans l'une des périodes les plus passionnantes de son évolution, par l'un de ses artisans les plus glorieux! Mais ce que nous devons souligner dès maintenant, c'est qu'à ce don d'enseignement s'alliait chez Paul Langevin la conception la plus généreuse de son rôle d'éducateur. Ceci explique qu'il se pencha toujours avec le plus bienveillant intérêt sur les enseignants les plus modestes, les instituteurs, si admirablement dévoués à leur tâche mais très isolés dans leur cadre. Non seulement il se sentait envers eux une dette personnelle de reconnaissance, mais il eut très tôt une conscience aiguë des graves défauts de l'enseignement français. En particulier, la formation cloisonnée qui séparait, tout au long de leur carrière, les maîtres du primaire de ceux du secondaire et du supérieur lui apparaissait comme tout à fait défavorable au développement de leur culture générale, et par conséquent à leur fonction. Et nous verrons quelle importance croissante Paul Langevin attachera à la culture populaire.

Pendant ses années d'Ecole normale et lors de son séjour à Cambridge, Paul Langevin avait acquis une large et précise connaissance de toutes les théories nouvelles sur la structure granulaire de l'électricité et la théorie électromagnétique. Dès les premières années de son enseignement au Collège de France, il réfléchit longuement à ces sujets qui sont au coeur de la physique et qu'il expose dans ses cours. Aussi, dès 1904, se voit-il désigné pour représenter la France au Congrès international des sciences et des arts de Saint-Louis (USA), en même temps que le célèbre Henri Poincaré, son maître et ami, de vingt ans son aîné. Dans un vaste rapport sur La Physique des électrons, il fait avec une clarté et une maîtrise étonnantes le point sur tous les progrès récents, précisant les données acquises et aussi les difficultés ou les obscurités qui subsistent. Comme dans son enseignement, il inclut dans son exposé le résultat des réflexions personnelles auxquelles l'a conduit cette notion d'électron. Parmi ces résultats se trouve — brièvement indiqué au passage — ce qui constituera l'une de ses plus belles constructions: la théorie du magnétisme, qu'il publiera l'année suivante. En raison de son importance fondamentale, nous en rappellerons l'essentiel. Reprenant une idée d'Ampère et assimilant une orbite électronique à un petit aimant, il donne l'explication générale des propriétés des corps dia- et paramagnétiques, et retrouve toutes les lois qui avaient été établies expérimentalement par Pierre Curie. Sous l'action d'un champ magnétique, l'électron circulant sur son orbite subit un effet d'induction qui tend à s'opposer à ce champ. Le diamagnétisme est donc un phénomène absolument général, une propriété atomique sensiblement indépendante de la température ; et la susceptibilité peut en être calculée en fonction du nombre des électrons de l'atome