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Clôturant ce magnifique cycle d'études par un brillant succès à l'Agrégation en 1897, il reçoit en récompense, de la Ville de Paris, une bourse d'études pour un séjour d'une année en Angleterre. Il choisit le très réputé Cavendish Laboratory de Cambridge, qui était alors l'un des foyers de recherche les plus actifs, animé par Joseph John Thomson. Tout de suite adopté par le maitre et par ses élèves dans une confiante atmosphère de travail en commun, il liera avec plusieurs d'entre eux d'étroits et durables liens d'amitié, notamment avec Rutherford, et aussi avec Townsend, Wilson, Richardson, qui tous deviendront bientôt des physiciens notoires. Et plus tard il recevra, des grandes Universités anglaises, nombre de distinctions des plus honorifiques. Pour tous ceux qui la vécurent, cette exaltante période de la science laissa un souvenir extraordinaire: car les découvertes retentissantes de cette fin de siècle, celle des rayons X par Röntgen et celle de la radioactivité par Becquerel puis par Pierre et Marie Curie, suscitaient de nombreuses expériences qui venaient étayer constamment les données encore incertaines de la théorie atomique. Cette incessante fécondation réciproque de l'expérience et de la théorie, à laquelle Paul Langevin apportera durant toute sa carrière des contributions de tout premier ordre, il la mettra souvent en relief dans de remarquables conférences scientifiques et philosophiques, dont quelques-unes seulement sont conservées. A Cambridge, où Joseph John Thomson venait précisément de mesurer avec Townsend la charge négative de l'électron, se multipliaient les expériences sur les ions gazeux. Paul Langevin y apporte une contribution essentielle en mettant en évidence le rayonnement secondaire émis par les métaux sous l'action des rayons X, et en montrant que cette émission est une propriété atomique indépendante de l'état de combinaison du métal. Puis il s'oriente vers l'étude générale des propriétés des ions, qu'il poursuivra à Paris pendant plusieurs années: sujet auquel il ne cessera jamais de s'intéresser. Il développe à cette occasion des considérations de théorie cinétique dont il déduit mainte conséquence dans la solution de problèmes tels que chocs entre particules, mouvement brownien, phénomènes généraux de fluctuation... L'étude de la conductibilité de l'air atmosphérique l'amène à la découverte des gros ions, dont il interprète le mécanisme de formation par fixation de charges électriques sur les poussières et sur les gouttelettes en suspension. Il en déduit, du point de vue thermodynamique, que la couche supérieure de nuages doit être distante de la couche inférieure de plusieurs kilomètres, la condensation ne pouvant s'effectuer que quand la vapeur d'eau à très basse pression redevient sursaturante. De même, la recombinaison des ions variant en raison inverse de la pression, on doit trouver à très haute altitude une couche formée de charges libres des deux signes, donc très conductrice (couche de Heaviside).