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sœur de Septima, esclave comme elle, et qui mourut à seize ans, avant qu’aucun homme eût respiré son odeur. La tombe de Phoinissa était étroite comme son corps. La pierre étreignait ses seins tendus de bandelettes. Tout près de son front bas une longue dalle arrêtait son regard vide. De ses lèvres noircies s’envolait encore la vapeur des aromates où on l’avait trempée. Sur sa main sage brillait un anneau d’or vert incrusté de deux rubis pâles et troubles. Elle songeait éternellement dans son rêve stérile aux choses qu’elle n’avait point connues.

Sous la blancheur vierge de la lune nouvelle, Septima s’étendit près de la tombe étroite de sa sœur, contre la bonne terre. Elle pleura et elle froissa son visage à la guirlande sculptée. Et elle approcha sa bouche du conduit par où on verse les libations, et sa passion s’exhala :

— Ô ma sœur, dit-elle, détourne-toi de