Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je bondis subitement ; je lui saisis la bouche de mes mains affreuses. Il n’était vêtu que d’une chemise rude ; ses pieds étaient nus et ses yeux restèrent placides. Et il me considéra sans étonnement. Alors, sachant qu’il ne crierait point, j’eus le désir d’entendre encore une voix humaine et j’ôtai mes mains de sa bouche, et il ne s’essuya pas la bouche. Et ses yeux semblaient ailleurs.

— Qui es-tu ? lui dis-je.

— Johannes le Teuton, répondit-il. Et ses paroles étaient limpides et salutaires.

— Où vas-tu donc ? dis-je encore.

Et il répondit :

— A Jérusalem, pour conquérir la Terre sainte.

Alors je me mis à rire, et je lui demandai :

— Où est Jérusalem ?

Et il répondit :

— Je ne sais pas.

Et je dis encore :

— Qu’est-ce que Jérusalem ?

Et il répondit :

— C’est Notre Seigneur.