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l’argent que vous payent les enfants pour vos lampes ?

— Oui, dit-elle, simplement. Mais je gagne bien peu. Car la pluie sinistre éteint souvent mes petites lampes, au moment où je les tends pour les donner. Et quand elles sont éteintes, les enfants n’en veulent plus. Personne ne peut les rallumer. Il ne me reste que celles-ci. Je sais bien que je ne pourrai en trouver d’autres. Et quand elles seront vendues, nous demeurerons dans l’obscurité de la pluie.

— Est-ce donc la seule lumière, dis-je encore, de cette morne saison ; et comment éclairerait-on, avec une si petite lampe, les ténèbres mouillées ?

— La pluie les éteint souvent, dit-elle, et dans les champs ou par les rues elles ne peuvent plus servir. Mais il faut s’enfermer. Les enfants abritent mes petites lampes avec leurs mains et s’enferment. Ils s’enferment chacun avec sa lampe et un miroir. Et elle suffit pour leur montrer leur image dans le miroir.

Je regardai quelques instants les pauvres flammes vacillantes.